Alors que le ministère de l’Intérieur dévoile une cartographie des lieux de deal en France, le maire (PS) de Saint-Denis, Mathieu Hanotin, pose la question de la légalisation du cannabis, comme l’a fait il y a quelques jours le député (LFI) Éric Coquerel.
Comment lutter contre un trafic qui empoisonne au quotidien la vie de certains quartiers? Le maire (PS) Mathieu Hanotin réagit à la méthode prônée par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.
Le ministère de l’Intérieur recense 276 points de deal en Seine-Saint-Denis. Cela vous semble plausible ? Combien en comptez-vous à Saint-Denis ?
MATHIEU HANOTIN. Tout dépend de ce qu’on appelle point de deal. À Saint-Denis, il y a des zones avec un trafic intense : dans les cités Péri et Dourdin par exemple. Ailleurs, le phénomène est plus fluctuant. Le trafic se déplace en fonction de là où se portent les efforts de la police.
Tenir le compte des points de deal démantelés, cela vous semble-t-il pertinent dans la lutte contre le trafic ?
Je pense qu’il y a deux réponses au problème du trafic. Une réponse globale, qui se situe sur un plan législatif. On n’éradiquera pas le trafic, parce qu’il y a une demande. Cinq millions de personnes consomment régulièrement du cannabis en France. Cela pose la question de la légalisation, qui permet un meilleur contrôle et une politique de prévention, notamment en direction des mineurs car c’est parmi eux que le cannabis fait des ravages.
Vous êtes de ce point de vue d’accord avec le député Insoumis Éric Coquerel ?
Et avec bien d’autres, qui le disent depuis longtemps, comme Daniel Vaillant (NDLR : ex-ministre PS de l’Intérieur, et ancien maire du XVIIIe arrondissement), par exemple ! Mais il faut aussi une réponse répressive, pour lutter contre toutes les nuisances que génère le trafic aujourd’hui dans nos villes.
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Justement, que faire face au trafic qui empoisonne la vie de certains quartiers ?
C’est un enfer pour les habitants. À la cité Péri, par exemple, les gens ne dorment pas, les dealeurs urinent dans les cages d’escalier, s’amusent à faire éclater des pétards en pleine nuit, sabotent les lumières… Cela cause aussi des ravages parmi les jeunes qui rentrent dans la logique du deal. Il faut mettre cette réalité en lumière et je salue tout ce qui permet de renforcer l’action de l’Etat, des services de police dans nos quartiers. Il y a deux mois, je suis d’ailleurs allé rencontrer le ministre de l’Intérieur, et nous expérimentons depuis une action ciblée sur le secteur de Péri. À l’échelle de la ville, nous allons par ailleurs créer de nouvelles brigades de la police municipale, pour lutter contre les nuisances liées au trafic.
Gérald Darmanin annonce aussi la création d’une plate-forme Internet, pour que les citoyens signalent des points de trafic. Une bonne idée ?
Oui, à condition que les citoyens puissent constater que cela donne des résultats. Il faut mettre les moyens. Agir de la même manière sur 4000 points de deal en France n’aura pas d’efficacité. Il y a peu d’équivalents à ce qui se passe à la cité Péri. Il faut concentrer l’action publique pour lutter contre les supermarchés de la drogue à ciel ouvert. Car lorsque c’est le cas, c’est tout un quartier qui vrille.
Source : Leparisien.fr