Publié le 4 Septembre 2020 | Par Guillaume Erner pour France-Culture
Depuis le 1er septembre 2020, les consommateurs et détenteurs de stupéfiants sur la voie publique sont désormais passibles d’une amende forfaitaire de 200 euros et en sus, d’une inscription au casier judiciaire. S’agit-il d’un pas vers la dépénalisation ou vers plus de répression ?
Depuis le 1er septembre 2020, les consommateurs et détenteurs de stupéfiants sur la voie publique sont désormais passibles d’une amende forfaitaire de 200 euros et en sus, d’une inscription au casier judiciaire. Les fumeurs de cannabis sont la principale cible des autorités – ils sont aussi plus nombreux que les usagers d’autres drogues. Comment interpréter cette amende sur la voie publique ? S’agit-il d’un pas vers la dépénalisation ou vers plus de répression ?
Guillaume Erner reçoit Renaud Colson, maître de conférence en droit à l’Université de Nantes, co-auteur avec Henri Bergeron, de « Les drogues face au droit », ed. PUF, et de « European Drug Policies », ed. Routledge.
Un assouplissement ou un durcissement de la loi ?
Cette mesure a deux fonctions. D’abord, une sanction managériale : il s’agit de simplifier un contentieux de masse, on n’a plus de procédure papier avec cette amende forfaitaire délictuelle, les forces de l’ordre pourront verbaliser très rapidement les usagers qui, jusqu’à maintenant, faisaient l’objet d’une procédure plus compliquée. La première fonction de cette réforme, c’est de simplifier ce contentieux.
Et puis, il y a une fonction symbolique, qui est de donner à voir l’efficacité de l’Etat et de réaffirmer rituellement l’interdit.
Quels effets ?
Mais s’agissant des effets, c’est moins clair. On peut attendre une hausse de la répression parce qu’il va y avoir une facilité à verbaliser et à sanctionner qui sera accrue.
Et puis, on a une inscription au casier judiciaire qui va s’imposer à des usagers qui, pour certains, faisaient l’objet jusqu’à maintenant de l’alternative aux poursuites, de rappel à la loi, qui n’était pas inscrite sur leur casier judiciaire.
Le paiement de l’amende, pour l’instant, on ne sait pas trop ce que ça va donner, mais généralement, en matière de stups, il n’y a pas plus de la moitié des amendes qui sont effectivement payées. Une amende non payée, ça donne lieu à un contentieux a posteriori qui va d’une certaine manière réengorger les juridictions qu’on avait vocation à désengorger par ces dispositifs.
» Derrière un affichage qui donne à voir une réaffirmation de l’interdit il y a sans doute un risque de répression accrue avec de la discrimination : une verbalisation de ce type se fait sur les gens qui consomment à l’extérieur, consomment dehors. » Renaud Colson
Donc les centaines de milliers, les millions de consommateurs de cannabis qui ont le luxe de pouvoir consommer tranquillement à un l’intérieur du domicile, ils devront être être relativement épargnés par cette mesure.