Tout le monde n’est pas égal face à la drogue : accoutumance oblige, les fumeurs occasionnels de cannabis ressentent davantage les effets que les fumeurs quotidiens. Des chercheurs français viennent de le prouver, en menant l’expérience la plus réaliste possible : ils ont fait fumer de vrais joints à leurs cobayes.
« Des joints de qualité et bien dosés. » D’habitude, les expériences scientifiques sur le cannabis sont plutôt menées avec des sprays, des vapoteuses ou des cachets. Mais cette fois, les chercheurs ont voulu que le test se rapproche le plus possible de la « vraie vie » : pour mesurer les effets du cannabis au volant, ils ont fait fumer de véritables joints à leurs testeurs.
Des plants provenant d’une saisie policière
« Nous avons fait fumer des jeunes consommateurs, occasionnels (une à deux fois par semaine) et quotidiens (une à deux fois par jour), à qui l’on a donné soit un placebo, soit un joint chargé de 10 mg de THC (la substance active présente dans le cannabis), soit 30 mg« , détaille le professeur Jean-Claude Alvarez. Chef de service pharmacologie-toxicologie à l’Ap-Hp, professeur de pharmacologie à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, il co-signe cette étude inédite.
Les 30 volontaires, recrutés en faculté de droit et de médecine, ont donc fumé ce cannabis provenant d’une saisie policière : « Étant expert judiciaire, je travaille avec la justice sur les analyses de saisies. En l’occurrence, j’avais une saisie de pieds de cannabis, fortement dosés, de très bonne qualité. Donc on a utilisé ce vrai cannabis pour préparer nos joints », explique le professeur Alvarez. Et cela ne s’est pas fait à la légère : « Vous imaginez bien, nous avons demandé toutes les autorisations du juge d’instruction, du procureur, de la police… » Pour le côté médical, « Bien entendu, nous sommes passés par un comité d’éthique qui a validé la procédure, et d’ailleurs l’étude a été financée par le ministère de la Santé« , précise-t-il.
« Tous les participants ont dit que les joints étaient vraiment bien faits ! »
Pour que le test soit le plus réaliste possible, les chercheurs ont sollicité l’expertise d’un consommateur de cannabis pour rouler les joints. « On voulait mimer la vraie vie. D’ailleurs, tous les participants ont dit que les joints étaient vraiment bien faits !« , s’amuse Jean-Claude Alvarez.
« Ils ne contenaient que du THC, ils n’étaient pas coupés. » De quoi ravir les testeurs : « Ils étaient contents. C’était un moyen d’avoir un bon joint, et ils avaient même un dédommagement financier, comme le veut la procédure, car nous avions besoin d’eux trois fois 24 heures !« , poursuit-il.
Le contexte prête à sourire mais les résultats sont très sérieux
Les chercheurs n’ont toutefois pas poussé le réalisme jusqu’à faire conduire les cobayes sur de vrais véhicules : à la place, ils ont pris le volant d’un simulateur de conduite. Les résultats sont inédits : « Le résultat est clair : on augmente le temps de réaction, et la conduite est modifiée. Mais les effets sont nettement plus marqués et plus longs chez les fumeurs occasionnels que chez les chroniques« , note le professeur. Les « occasionnels » voient leur temps de réaction s’allonger de 27 %… contre 11 % « seulement » pour les fumeurs chroniques.
Par ailleurs, « Les effets durent 13 heures chez un occasionnel et 8 heures chez un chronique. » Si vous fumez uniquement le week-end, par exemple, vous devriez donc attendre au moins 13 heures avant de reprendre le volant. Un chiffre nouveau : jusqu’à présent, « Personne ne savait combien de temps il fallait réellement attendre avant de ne plus être considéré comme dangereux sur la route. »
Le dépistage salivaire, outil défaillant ?
Autre découverte : les tests de dépistage salivaires ne s’avèrent pas suffisamment efficaces. « Ils marchent très bien si le test est effectué immédiatement, mais son efficacité décroît très vite. Grosso modo, _cinq heures après avoir fumé, seul un conducteur sur deux est testé positif_. Et entre huit et dix heures, tout est négatif. » Alors que les effets du produit, eux, subsistent bien après ces cinq à dix heures…
Enfin, il faut noter que tous les participants étaient des hommes. Logique : sur la route, 93 % des accidents mortels impliquant des stupéfiants sont causés par des hommes. La plupart sont âgés de 18 à 34 ans, selon la Sécurité Routière.
Source : France Inter
Quand je fumais du cannabis, je fumais quelques lattes sur le joint et le reposait. En fonction de ce que j’avais à faire, je savais si je pouvais continuer ou pas, en fonction de mon état d’ébriété. Comme avec l’alcool, certaines personnes se croient en état de conduire après avoir consommer. La même dose de produit, quel qu’il soit ne fait pas le même effet sur tout le monde, et personne n’a la même conscience….