À partir du 1er avril, l’Allemagne entre dans une nouvelle ère en légalisant le cannabis, devenant ainsi, avec Malte et le Luxembourg, le troisième pays européen à franchir cette étape. Cette décision, qui intervient après des débats intenses et l’adoption d’une loi promue par le gouvernement d’Olaf Scholz, marque un changement significatif dans la politique allemande sur les drogues. Cette mesure s’accompagne de restrictions précises, visant à encadrer la production, la vente et la consommation de cannabis dans le pays.
Les détails de la légalisation :
À partir du 1er avril, les adultes en Allemagne seront autorisés à acheter jusqu’à 25 grammes de cannabis par personne, deux fois par mois maximum. Les individus âgés de 18 à 21 ans auront droit à une limite de 30 grammes par mois. De plus, la possession de petites quantités de cannabis en public ne sera plus passible de sanctions policières. Cependant, l’achat se fera exclusivement auprès d’associations à but non lucratif, sous surveillance étroite des autorités publiques. La vente commerciale de cannabis reste interdite. À partir du 1er juillet, la culture à domicile sera autorisée, avec une limite de trois plants par personne, réservée à un usage personnel. Des restrictions sur les lieux de consommation seront également en place, notamment une interdiction à moins de 100 mètres des écoles, aires de jeux ou zones piétonnes.
Am 01. April 2024 tritt in Deutschland das #Cannabis|gesetz in Kraft.
Für diesen Tag haben viele von uns seit Jahrzehnten gekämpft und in den letzten gut zwei Jahren noch mal alles gegeben.
Wir wollen diesen historischen Tag mit euch gemeinsam begehen. pic.twitter.com/nmh4pmArkf
— CSC Hamburg (@CSC_FHH) March 25, 2024
Implications pour les résidents et les touristes :
Seuls les résidents allemands ayant vécu dans le pays depuis plus de six mois pourront bénéficier de cette légalisation. Les touristes et les étudiants étrangers seront exclus et risqueront des amendes voire une peine de prison en cas de possession ou d’importation illégale de cannabis. Cette mesure vise à décourager le marché noir et à garantir un contrôle de qualité des produits, comme le soutient le ministre de la Santé allemand.
L’exemple du Canada :
L’Allemagne s’inspire de l’expérience du Canada, qui a légalisé le cannabis de manière encadrée en 2018. Cette décision a conduit à une augmentation significative des achats sur le marché légal, tout en maintenant la stabilité de la consommation chez les jeunes. Une campagne de sensibilisation similaire sera lancée en Allemagne, avec un rapport parlementaire prévu en octobre 2025 pour évaluer les effets sur la santé des jeunes.
#Canada: The government published the final report on its review of the #Cannabis Act. 🍁https://t.co/veSyxzno5T pic.twitter.com/Y6oTZUS7Jp
— The Leafy Street EU (@theleafystreet) March 25, 2024
Réponses des villes françaises :
La légalisation en Allemagne suscite des réflexions en France, notamment à Strasbourg et à Bègles.
Strasbourg :
La maire écologiste de Strasbourg, Jeanne Barseghian, appelle à une expérimentation locale pour changer l’approche répressive française. La ville se trouve dans une situation unique en tant que ville frontière avec l’Allemagne, où la légalisation du cannabis entre en vigueur. La proposition vise à évaluer les effets de cette légalisation sur les flux transfrontaliers et à adapter les politiques locales en conséquence.
Strasbourg dispose également d’une expérience et d’un savoir-faire en matière de prévention et d’accompagnement des usagers de drogues, notamment avec sa salle de consommation à moindre risque. Cette salle représente seulement la surface visible d’un système complexe d’organisations, comprenant des médecins et des élus, qui abordent ce sujet non pas dans une perspective punitive, mais plutôt sanitaire. L’approche est axée sur la compréhension que l’addiction est un problème de santé publique, nécessitant un accompagnement pour permettre aux individus de surmonter leurs dépendances.
Cependant, la décision de mettre en œuvre une telle expérimentation ne relève pas de la compétence des municipalités. Jeanne Barseghian espère obtenir le soutien des autorités nationales et se réfère au traité d’Aix-la-Chapelle, signé en 2019 entre la France et l’Allemagne, qui prévoit des « dérogations » pour faciliter la réalisation de projets transfrontaliers, notamment dans le domaine de la santé.
Légalisation du cannabis récréatif en Allemagne : Strasbourg est « favorable à une expérimentation sur le territoire », d’après @AlexandreFeltz, médecin et adjoint à la Santé, « pour faire évoluer les choses » sur @bleualsacehttps://t.co/ytqRavhHFW pic.twitter.com/5G1wDB6NRa
— France Bleu Alsace (@bleualsace) March 27, 2024
Bègles :
La ville de Bègles, près de Bordeaux, envisage également une légalisation encadrée du cannabis.
Le maire écologiste de Bègles, Clément Rossignol-Puech, avait déjà initié des discussions sur ce sujet en juin dernier et avait ensuite présenté un « cahier d’expérimentation » en octobre afin de définir précisément les contours de cette proposition. Il exprimait son ambition de faire de sa ville la première à expérimenter une légalisation encadrée de la consommation de cannabis en France.
Encadrer la consommation pour contrer le trafic Selon le maire de Bègles, encadrer la consommation permettrait de mieux contrôler les produits accessibles aux jeunes et de lutter plus efficacement contre les trafics.
« Je ne fais aucunement l’apologie du cannabis. Mon objectif est de réduire sa consommation, de l’encadrer, à l’instar du tabac et de l’alcool, et de diminuer les trafics. Ce n’est pas une politique propre aux écologistes de gauche. La société est prête, mais les blocages viennent de l’État », a déclaré Clément Rossignol-Puech.
Cette proposition s’appuie sur un rapport du Conseil économique social et environnemental (Cese), qui a conclu à la nécessité d’une légalisation encadrée. Le maire insiste sur le caractère prudent de cette approche, excluant toute vente en libre-service et visant à limiter l’accès au cannabis à un nombre restreint de personnes sélectionnées.
Avis de bon sens rendu par le Cese. En tant que maire confronté aux trafics, je propose à @EmmanuelMacron @Elysee de faire de ma commune de #Bègles en #Gironde le premier territoire d’expérimentation pour la culture, la vente et la consommation encadrée du #cannabis récréatif https://t.co/8w1wcntYnO
— Clément Rossignol Puech (@clemrossignol) January 25, 2023
Conclusion :
La légalisation du cannabis en Allemagne marque un tournant dans la politique européenne sur les drogues. Bien que cette décision soit encadrée de restrictions, elle offre des perspectives nouvelles en matière de santé publique et de sécurité. Les expérimentations envisagées par certaines villes françaises témoignent d’un débat en évolution sur la question de la légalisation du cannabis en Europe.
Il est impératif que le gouvernement français prenne des mesures concrètes en matière de politique des drogues, et ce, indépendamment des résultats de la légalisation chez nos voisins allemands. Notre approche actuelle est désastreuse à bien des égards, que ce soit sur le plan de la santé publique, de la sécurité ou de l’économie. Il est grand temps de reconnaître que le sujet des drogues est d’une importance capitale et qu’il requiert une réponse bien plus sérieuse que la campagne marketing que sont les « opérations places nettes XXL ».
La prohibition des drogues, en particulier celle du cannabis, cause bien plus de tort à la société que le produit lui-même. Malgré les efforts visant, soi-disant, à protéger les jeunes et à restreindre la consommation, les résultats sont tout à fait contraires. Les chiffres de l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies sont éloquents : 47,3 % des adultes français déclarent avoir déjà consommé du cannabis, un pourcentage plus élevé que dans n’importe quel autre pays de l’UE. De plus, selon l’Observatoire français des drogues, la France compte environ 5 millions d’usagers de cannabis.
Ces statistiques sont alarmantes et témoignent de l’échec flagrant de notre politique actuelle en matière de drogues. Il est temps de se tourner vers des approches plus efficaces, axées sur la réduction des risques, la prévention et l’éducation. Plutôt que de persister dans une logique de prohibition qui alimente le marché noir avec ses dangers, et les risques associés à la consommation de substances illicites, il est temps d’explorer des solutions plus pragmatiques et respectueuses des droits individuels.
En conclusion, au regard de se qui ce passe en Allemagne aujourd’hui et dans de plus en plus d’endroit dans le monde depuis plusieurs décennies, il est impératif que le gouvernement français reconsidère sa politique des drogues et prenne des mesures audacieuses pour répondre aux défis posés par la consommation de substances illicites. Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre passivement les résultats des politiques menées par nos voisins. Il est temps d’agir avec détermination pour protéger la santé publique, assurer la sécurité des citoyens et promouvoir des politiques drogues plus justes et plus efficaces.
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