En France, la question de la légalisation du cannabis reste un sujet tabou, au point que certains médias refusent d’en débattre. L’article la France devrait à son tour songer à libéraliser le cannabis, de Frédéric Cherbonnier, professeur d’économie, jugé « polémique », n’a pas été publié par de grands médias français. Pourtant, un débat de fond sur la légalisation du cannabis est essentiel. Le maintien de la prohibition, inefficace et coûteux, perpétue un modèle criminogène, alors que de nombreux pays démontrent que des alternatives existent. Dans cet article le CIRC explore ces enjeux et souligne la nécessité d’une approche pragmatique et responsable.
Le référendum d’Éric Piolle
Récemment, le maire de Grenoble, Éric Piolle, a appelé à un référendum sur la légalisation du cannabis. Bien que cette idée puisse sembler audacieuse, elle est très risquée. Les stigmates de plus de 50 ans de prohibition ne disparaîtront pas après quelques semaines de débats, si toutefois ces débats sont équitables. Comme le souligne le CIRC, un tel référendum pourrait consolider des peurs irrationnelles plutôt que de mener à une réflexion rationnelle.
La proposition de Piolle a rapidement été rejetée par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et critiquée par les grands médias. Pourtant, un véritable débat de fond mériterait d’être mené, comme le montre cette analyse récente de Frédéric Cherbonnier, professeur à Sciences Po Toulouse.
Dans ce contexte, une punchline mordante de notre camarade du CIRC, F-G L, illustre parfaitement l’absurdité de certains arguments prohibitionnistes : « Pas besoin d’interdire pour éviter l’abus : la sodomie est légale et gratuite, pourtant, tout le monde ne s’y met pas. Alors pourquoi paniquer sur le cannabis ? ». Une réflexion qui démontre avec humour combien la panique morale sur le cannabis est disproportionnée.
Une analyse approfondie
Dans son article publié par L’Agefi, Frédéric Cherbonnier rappelle les coûts économiques et sociaux de la prohibition : plus d’un million d’heures de travail des forces de police, un engorgement judiciaire, et une jeunesse exposée à des dealers dans les cours d’école. En comparaison, la légalisation permettrait de contrôler l’accès et la qualité du produit tout en réduisant la consommation chez les jeunes, comme l’ont montré les expériences du Colorado et de Washington.
« Affaiblir au maximum le marché noir suppose que le marché légal dispose de cannabis de qualité, en quantité suffisante, avec un prix de départ suffisamment bas ». – Frédéric Cherbonnier
Cependant, la mise en œuvre est cruciale. Une régulation mal conçue, comme au Canada ou en Uruguay, peut limiter les effets positifs. Frédéric Cherbonnier prône un monopole public sur la production et la distribution, une idée qui ne fait pas consensus au sein du CIRC. Nous militons depuis 1991 pour une légalisation incluant le droit immuable à l’autoproduction, ainsi que la création de Cannabis Social Clubs (CSC) et des Cannabistrots.
Conclusion
Le fait que les médias français censurent encore le débat sur la nécessité de légaliser le cannabis est révélateur d’un verrouillage idéologique persistant. Cela démontre également à quel point l’idée d’un référendum, comme proposé récemment par le maire de Grenoble, Éric Piolle, pourrait s’avérer un piège dangereux. À ce stade, une telle consultation populaire risquerait de détourner l’attention des véritables enjeux en réduisant cette question complexe à un choix binaire, façonné par des décennies de stigmatisation et de désinformation. En réalité, un référendum mal préparé et influencé par un débat médiatique biaisé ne ferait que repousser aux calendes grecques la légalisation en France.
La légalisation du cannabis mérite bien plus qu’un simple « oui » ou « non ». Elle exige une approche législative réfléchie, s’appuyant sur des débats approfondis, des analyses scientifiques rigoureuses et une écoute attentive des réalités sociales et économiques. Ce processus doit être porté par un engagement politique fort et courageux, à la hauteur des enjeux de santé publique, de justice sociale et de lutte contre la criminalité organisée.
Au CIRC, nous réaffirmons que la voie législative est la seule véritable solution pour faire avancer la société sur cette question. Si nous soutenons l’idée d’un débat national ouvert et honnête, celui-ci doit aboutir à des réformes cohérentes et fondées sur la raison et la justice, non sur des consultations populaires biaisées ou manipulées. Il est temps de sortir de l’immobilisme et d’en finir avec une prohibition criminogène et contre-productive. Nous appelons les décideurs à prendre leurs responsabilités et à construire une politique audacieuse et pragmatique, tournée vers l’avenir.
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