L’un des principaux objectifs de la légalisation du cannabis est de faire passer les consommateurs du marché illégal au marché légal, et au Canada, cela semble fonctionner.
Selon une étude publiée dans le Harm Reduction Journal, un nombre croissant de consommateurs canadiens se sont tournés vers le marché légal du cannabis au cours des trois premières années de légalisation du cannabis dans le pays, l’approvisionnement légal étant le plus élevé pour les boissons et les huiles et le plus faible pour les concentrés solides et le hasch.
L’un des objectifs de la loi canadienne sur le cannabis était de faire passer les consommateurs sur le marché légal, ce qui est essentiel pour garantir d’autres objectifs de protection de la santé publique, car les réglementations ont initié des normes de produits, d’étiquetage et de vérification de l’âge.
Les enquêteurs de l’École de santé publique de l’Université de Waterloo ont interrogé plus de 15 000 consommateurs canadiens de cannabis sur l’endroit où ils se procurent leurs produits, en évaluant les données des années 2019 à 2021. Les données couvrent la majorité des trois premières années de légalisation du cannabis au Canada, puisque l’octroi de licences pour la vente au détail a commencé en octobre 2018.
Un changement constant depuis le lancement de la légalisation
Selon une étude de 2021 publiée dans l’International Journal of Drug Policy, la part des produits récréatifs légaux dans la consommation globale de cannabis au Canada a commencé à 7,8 % en octobre 2018 et est passée à 23,7 % en septembre 2019, avec une forte variance selon les provinces. Au cours de cette première année, seules la fleur séchée et certaines huiles de cannabis étaient disponibles à l’achat légal, et d’autres produits comme les comestibles, les topiques et les extraits ont été rendus disponibles dans les points de vente au détail à partir de décembre 2019.
« Après l’expansion des ventes légales pour inclure des produits autres que la fleur, il est important d’examiner si les consommateurs utilisent le marché légal pour s’approvisionner en tous leurs edibles, topiques et extraits, ainsi qu’en fleur séchée », indiquent les auteurs.
Les données de l’étude internationale sur la politique du cannabis ont été recueillies par le biais d’enquêtes en ligne auto-remplies en septembre-octobre 2019, 2020 et 2021 auprès de répondants âgés de 15 à 65 ans. Les répondants devaient répondre à la question suivante : « Dans l’ensemble, environ quel pourcentage (%) des [produits] que vous avez utilisés au cours des 12 derniers mois provenait de sources LÉGALES/AUTHORISÉES ? » Ils pouvaient saisir une valeur numérique comprise entre 0 et 100, les réponses étant classées en trois catégories : « Toutes » (100 %), « Certaines » (1 à 99 %) et « Aucune » (0 %).
Tous les produits ont connu une augmentation d’une année sur l’autre pour les répondants déclarant que « tous » leurs produits étaient d’origine légale, les concentrés solides, le hasch et la fleur séchée étant les moins bien classés et les capsules d’huile orale, les gouttes d’huile orale et les boissons étant les plus susceptibles d’être d’origine légale. En 2021, 54,3 % des achats de fleurs séchées provenaient de commerces de détail légaux.
Variables contribuant à l’approvisionnement du marché canadien
L’étude s’est également intéressée à la fréquence d’utilisation des produits par les consommateurs. Elle a révélé que les consommateurs fréquents avaient plus de chances de s’approvisionner « en partie » sur le marché légal que les consommateurs occasionnels. Ce résultat va à l’encontre de l’hypothèse des chercheurs, qui pensaient que les consommateurs fréquents seraient moins susceptibles de s’approvisionner légalement en raison d’une « moins bonne perception du cannabis légal ».
Les auteurs citent la variation de l’approvisionnement légal en fonction du produit, la moitié environ des consommateurs de concentré solide achetant « tous » les produits légalement, contre 82% des consommateurs de boisson au cannabis. Les taux élevés d’approvisionnement légal pour les boissons peuvent s’expliquer par le fait qu’il s’agit de produits plus récents qui sont moins accessibles sur les marchés illégaux.
Ils ajoutent que les produits typiquement perçus comme des « produits médicaux », tels que les huiles orales et les capsules, ont également vu plus de consommateurs acheter « tous » les produits légalement. Ils soulignent également que les consommateurs de produits « médicaux » pourraient accorder une plus grande priorité aux produits légaux dont la qualité est réglementée, testée et normalisée pour garantir une dose meilleure et plus constante.
En examinant les différences entre les provinces, les auteurs indiquent que les consommateurs de toutes les provinces sont plus susceptibles de se procurer « tous » leurs produits comestibles légalement que ceux du Québec, car c’est la seule province qui restreint les produits comestibles susceptibles d’attirer les jeunes, en éliminant certains des formats comestibles les plus populaires comme les bonbons et le chocolat.
Inversement, les consommateurs de fleurs séchées du Québec étaient plus susceptibles d’acheter « toutes » leurs fleurs séchées légalement que ceux de la Colombie-Britannique et de l’Ontario, citant le Québec comme ayant certains des prix de fleurs séchées les plus bas depuis la légalisation, ce qui le rend potentiellement plus désirable que l’achat de fleurs séchées illégales par rapport aux autres provinces.
La nécessité d’une surveillance accrue
« L’approvisionnement légal en cannabis était plus important en 2021 qu’en 2020 pour les dix produits du cannabis [étudiés]. En 2021, le pourcentage de consommateurs s’approvisionnant légalement pour tous leurs produits au cours des 12 derniers mois allait de 49 % des consommateurs de concentré solide en 2021 à 82 % des consommateurs de boisson au cannabis « , ont rapporté les enquêteurs.
Les enquêteurs ont souligné la nécessité d’études futures pour continuer à examiner l’approvisionnement en produits du cannabis au Canada au fil du temps, ainsi que l’exploration d’autres moyens de déplacer le marché illégal pour tous les produits du cannabis « sans promouvoir également l’utilisation de produits du cannabis à forte puissance ».
Ils ont également demandé que d’autres recherches soient menées pour examiner comment la consommation de produits varie d’une province à l’autre et si ces habitudes sont liées au prix et à la disponibilité des sources légales.