En accusant les consommateurs d’être « des complices de fait » des trafiquants, le président a une nouvelle fois conforté Darmanin dans sa ligne anti-drogues. Il a en revanche trahi le candidat Macron en 2017 et certains élus de son camp, favorables à un débat sur la légalisation du cannabis.
par Étienne Baldit
Les partisans d’une légalisation encadrée du cannabis – et ils sont quelques-uns à LREM – ont peut-être été parcourus d’un fol espoir en entendant Emmanuel Macron prononcer les mots suivants, hier soir en visite au commissariat de la division nord de Marseille : « L’idée que dans certains quartiers, ce serait branché de prendre de la drogue pour que dans d’autres, on ait des jeunes qui se fassent tuer parce qu’ils la vendent ou surveillent [le trafic], c’est terminé. » Mais ce qui aurait pu être un vibrant plaidoyer pour la fin d’une politique répressive dont l’échec est patent à tous niveaux (sécuritaire, sanitaire, économique) était immédiatement complété par le chef de l’État : « Il faut que tout le monde comprenne dans notre pays que les consommateurs de drogue sont des complices de fait. De fait. » Des propos isolés en vidéo dans un tweet présidentiel dûment relayé par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, qui voit sa ligne une fois de plus confortée.
Le débat est clos
Et Macron de promettre aux policiers l’entourant en cercle de continuer sa stratégie de guerre contre la drogue, qui consiste à «pilonner» le trafic, à « créer l’irréversibilité de certaines fermetures de points de deal» et à «démanteler les réseaux les plus installés au niveau national et à l’international ». Louables objectifs dont la poursuite, depuis des décennies partout dans le monde, semble cependant bien vaine. Ce que les députés (notamment LREM) auteurs d’un rapport parlementaire, nourri de travaux et d’auditions poussés, ont essayé de faire valoir depuis des mois. Ils n’ont eu, pour seule réponse de l’exécutif, que les rodomontades de Darmanin contre cette « merde » qu’est la drogue et l’annonce par le président d’un « grand débat national sur la consommation de drogue et ses effets délétères ». Autant dire que le débat est clos, contrairement à ce que le candidat Macron avait pu laisser entrevoir en estimant que la légalisation pouvait avoir «une forme d’efficacité».
Source : Libération.fr