La première boutique officielle de cannabis ayant l’agrément de l’Etat de New York pourrait ouvrir à Manhattan dans les derniers jours de décembre, selon plusieurs médias.
Quels enjeux figurent derrière cette ouverture? Avec quelles restrictions? Et que représente ce marché?
Voici quelques éléments de réponse:
Une première boutique légale avant la fin de l’année?
Derrière cette première boutique officielle, opère l’association Housing Works, qui aide des personnes séropositives ou atteintes du sida, des anciens détenus et des SDF.
En parallèle, l’Etat de New York, dont le territoire s’étend au nord jusqu’au Canada, veut accorder les 150 premières licences à des commerçants condamnés dans le passé pour possession ou vente de cannabis. Le but: réparer ce qu’il considère aujourd’hui comme l’impact injuste et disproportionné de décennies de prohibition de la « marijuana », dont il estime que la criminalisation a particulièrement ciblé les communautés afro-américaines et hispaniques.
Si des expériences similaires ont déjà été tentées aux Etats-Unis, où le cannabis est légal dans une vingtaine d’Etats, celui de New York est le premier à aller aussi loin, soulignent les observateurs. Au total, 900 dossiers ont été déposés et 28 sésames ont déjà été délivrés à des commerces, qui n’ont pas encore ouvert mais peuvent déjà lancer des services de livraison, et huit à des associations.
Pas plus de 25 livreurs
Après les 150 premières licences, le marché sera ouvert à toutes les entreprises, mais avec des règles anti-concentration. Concrètement, une société opérant dans la culture du cannabis, ou sa transformation, ne pourra pas exercer dans la distribution, et inversement.
De même, les commerces pourront faire de la livraison, mais avec une limite de 25 employés pour cela.
Plus c’est fort en THC, plus c’est taxé
En plus des taxes payées par le consommateur, l’Etat de New York prévoit de taxer les distributeurs en fonction de la teneur en tétrahydrocannabinol (THC, la molécule psychoactive de la plante). Une erreur, selon le directeur de la Cannabis Association of New York (Cany) Dan Livingston qui redoute des prix trop élevés et la concurrence du marché illégal. Il craint aussi que cela n’incite les vendeurs à sous-évaluer le THC: « le consommateur pourrait se retrouver beaucoup plus +défoncé+ que prévu ».
L’Etat de New York promet de réutiliser les taxes générées par la vente de cannabis dans ses budgets pour la prévention contre les addictions, l’éducation et pour des subventions à des associations. Dans un rapport de 2018, il situait le marché illégal entre 1,7 et 3,5 milliards de dollars par an, soit entre 248 et 677 millions de dollars de potentielles taxes annuelles. Le secteur est aussi actif grâce au cannabis médical, au CBD et aux cultivateurs, entre autres.
Quelles restrictions?
A l’instar de l’alcool, la vente n’est autorisée qu’aux personnes de plus de 21 ans. Question quantité, un adulte peut détenir jusqu’à trois onces (85 grammes) de cannabis (ou 24 grammes de cannabis concentré) et un magasin ne pourra pas vendre plus que cette limite.
Le cannabis est en théorie toujours prohibé par les lois fédérales américaines et il est interdit d’en détenir quand on franchit les frontières d’un Etat américain ou en quittant le pays.
Une épine judiciaire dans le pied
Le processus de délivrance des licences est ralenti parce qu’il est attaqué au niveau judiciaire par une entreprise dont la demande a été rejetée, notamment au motif que son dirigeant a été condamné pour un délit lié au cannabis dans l’Etat du Michigan, et pas dans celui de New York.
Le temps d’examiner le dossier, un juge fédéral a imposé qu’aucune licence ne soit délivrée dans les cinq territoires concernés par le litige, notamment Brooklyn, l’arrondissement le plus peuplé de New York.