GÉRALD DARMANIN : RETOUR À LA CASE PÉTARD
On le savait déterminé, on le sait désormais borné. Ce que l’on aurait pu prendre, avec indulgence, pour de l’ignorance s’apparente désormais à de la pure démagogie. En se complaisant dans un discours sécuritaire d’une affligeante médiocrité, notre fringant ministre de l’Intérieur poursuit sa guerre contre le cannabis en des déclarations toujours plus irrationelles, semblant ignorer le tournant antiprohibitionniste qu’a pris l’histoire, outre-Atlantique tout du moins.
Un tournant que les conclusions de la mission parlementaire s’appliquant depuis un an, à étudier tous les aspects du chanvre (industriels, « bien-être », thérapeutiques ET récréatifs), ainsi que les résultats de la consultation citoyenne menée depuis le 13 janvier et se clôturant le 28 février, ne manqueront pas de constater en présentant à leur tour un projet de légalisation.
Le poison de la prohibition
Au mépris des résultats obtenus dans les États nord-américains ayant opté pour une autre politique, ce que M. Darmanin persiste à qualifier de « lâcheté » s’est véritablement révélé comme la solution pour lutter efficacement contre les trafics et la criminalité tout en préservant la santé et la sécurité des usagers et de l’ensemble des citoyen.ne.s.
La multiplication des règlements de compte entre bandes rivales, toujours plus violentes tant le marché des stupéfiants demeure profitable, devrait pourtant l’alerter. Mais rien n’y fait. Notre homme préfère au pragmatisme, la voie sans issue du sécuritaire au détriment des libertés publiques et individuelles.
Cet insupportable décalage entre des législateurs prompts à remettre en cause une idéologie mortifère et dépassée, et un exécutif autoritaire… et tout aussi dépassé, devient insupportable, ajoutant à la confusion, le mépris vis à vis d’une opinion publique de plus en plus sceptique en matière de politique répressive des stupéfiants comme le récent sondage mené pour le CNPD – collectif pour une nouvelle politique des drogues regroupant pas moins de 20 organisations* – le révélait et comme le confirmera sans doute la consultation en cours.
Ce double jeu gouvernemental vise une fois de plus à instrumentaliser un thème de campagne dans la perspective de la présidentielle à venir. Une stratégie à double tranchant avec laquelle la majorité présidentielle pourrait être amenée à « jouer » sur le terrain lepéniste sur lequel s’agite déjà le squatteur de la Place Beauvau. Une manœuvre politicienne dont les victimes demeurent les usagers et les quartiers populaires.
Il faut cependant relativiser les gesticulations ministérielles car, de l’aveu même de représentants de syndicats de police, si la loi venait à changer, les forces de l’ordre n’auraient qu’à s’incliner devant le bon sens, ministère compris.
* AGRR, AIDES, ASUD, Cannabis sans frontières, CIRC, Collectif Police contre la prohibition, FAAAT, Fédération addiction, GRECC, Ligue des Droits de l’Homme, Médecins du Monde, NORML France, Principes Actifs, Psychoactif, Safe, SOS addictions, Sud Intérieur, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature, Techno Plus
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