Série
par Jérémy Patrelle
« Family Business », la série Netflix labellisée « Beuh Blanc Rouge » est ratée. Ni Jonathan Cohen ni Gérard Darmon ne parviennent à faire décoller cette histoire de reconversion dans le cannabis.
Y aura-t-il une saison 2 pour Family Business ? Après avoir visionné les six épisodes de trente minutes qui composent la saison 1, on espère que non. Même si l’on se dit que la suite ne pourra pas être pire… Série française aux mérites largement vantés par Netflix, Family Business, baptisée judicieusement Tout part en fumée par le Netflix Canada, ne nous a jamais fait décoller. L’idée de départ sentait déjà le renfermé, le déjà-vu. Joseph Hazan (Jonathan Cohen), 35 ans, spécialiste des idées pourries, travaille à contre-cœur dans la boucherie casher de son père, Gérard (Gérard Darmon), tout juste veuf. Décidé à prendre sa vie en mains, Joseph semble enfin être touché par la grâce : ayant appris de sources proches du ministre de la santé que le cannabis allait être légalisé, il va changer la boucherie en beuhcherie. Dès les premières secondes, nous sommes plombés par le rythme et les dialogues. L’entretien de Joseph pour vendre un énième projet foireux, l’appli Sweetch qui déclenche des sons altérant la fluidité de la conversation lorsque le mot « tunnel » est prononcé, est complètement raté. Humour, jeu d’acteur, ambiance… tous les protagonistes semblent avoir une chape de plomb qui les empêchent de se dérider, de jouer, de faire rire. Elle ne les quittera jamais. Dommage, car Family Business est classée dans la catégorie comédie. Et si nous trouvons peu à peu notre rythme de croisière, à la fin des trois heures de la série, nous avons tout de même très peu ri, et trop peu souri. La preuve : notre blague préférée est celle Titi et du robinet signée Jonathan Cohen dans le coffee shop d’Amsterdam.
https://youtu.be/-zQbtUVjed4
Jonathan Cohen, que l’on aime beaucoup et que l’on avait élu l’homme le plus drôle de l’année en 2017, ne parvient jamais à emmener sa troupe avec lui. Trop neutre, il ne trouve personne non plus face à lui pour embarquer le spectateur dans les frasques familiales « cannabisiennes » qui sortent, il est vrai, de l’ordinaire. Heureusement, les rôles féminins ne s’en tirent pas trop mal : Liliane Rovère (Arlette dans Dix Pour Cent) toujours la langue bien pendue, Julia Piaton (fille de Charlotte de Turckheim vue dans dans les deux films Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ?!) dont le personnage, légèrement copié-collé sur Andréa de… Dix Pour Cent, permet à la famille Hazan de rester – un peu – sur Terre, et Louise Coldefy dans la rôle le plus réussi de la série, celui d’une fille de ministre complètement timbrée.
Pauvre Enrico…
Malheureusement, tout est quasiment toujours caricatural dans cette série. Les blagues (on préfère vous prévenir, celles sur les prouts reviennent très souvent), les rapports flics-dealers, parents-enfants et homme-femmes transpirent le cliché. Fatigué, Gérard Darmon semble débarquer de nulle part à chaque scène. Sauf une fois où il nous fait littéralement pleurer lorsqu’il revient sur les grands étapes de sa vie (sa femme, son beau-père, ses enfants, sa boucherie…). C’est bluffant, poignant, émouvant. On oublie même le fait qu’il parle en réalité à Valérie Damidot herself. Mais très vite la réalité reprend ses droits et reviennent lourdeurs et poncifs… Le bouquet final de Family Business ne réside pas dans la fin, qui laisse une ouverture béante pour une saison deux, mais dans la piètre prestation d’Enrico Macias. Le chanteur de 81 ans, idole du personnage qu’interprète Gérard Darmon, est celui par qui l’idée miraculeuse de transformer une boucherie en coffee shop arrive. Comme la série, il nous fait franchement de la peine. Sauf peut-être quand il fume des joints. Nous aurions dû faire pareil pour supporter les six épisodes.
Source : gqmagazine.com