Une étude récente a montré que lorsque les États adoptent des lois sur le cannabis à usage récréatif, les admissions en traitement de santé mentale diminuent.
L’étude, publiée dans la revue Health Economics, est remarquable étant donné les questions croissantes concernant l’impact du cannabis sur la santé mentale. Au cours des deux dernières décennies, de nombreux États ont légalisé la consommation de cannabis pour les adultes. Malheureusement, les recherches sur l’impact du cannabis sur la santé mentale sont mitigées.
Certaines études ont montré que le cannabis était utile pour certains troubles mentaux, tandis que d’autres suggèrent que le cannabis pourrait aggraver certains troubles. En raison de cette situation complexe, certains craignent que la légalisation du cannabis n’entraîne une détérioration de la santé mentale de la population en général.
Cette étude, cependant, suggère qu’un résultat plus positif arrive peu après les lois sur le cannabis récréatif – moins d’admissions en traitement de santé mentale.
Lois sur le cannabis et santé mentale
Jusqu’à récemment, il existait peu de recherches sur l’impact des lois sur le cannabis sur la santé mentale. Mais Alberto Ortega, chercheur à l’université de l’Indiana à Bloomington, a voulu en savoir plus. « Les lois sur la marijuana récréative continuent de gagner en popularité, mais leurs effets sur le traitement de la santé mentale ne sont pas clairs », explique Alberto Ortega. Il a donc voulu savoir si le nombre croissant d’États ayant légalisé le cannabis avait des effets significatifs.
Pour ce faire, Ortega a analysé les données sur les admissions en santé mentale provenant du système de rapport uniforme des établissements de santé mentale de l’État. Ces données portaient sur des patients âgés de 13 à 65 ans, sur une période de 12 ans allant de 2007 à 2019. Au cours de cette période, dix États ont adopté des lois sur le cannabis à usage récréatif. En comparant les données de chaque État, dans les années précédant et suivant l’adoption des nouvelles lois par les électeurs, M. Ortega a mis en évidence un schéma clair. Peu après l’adoption de la légalisation du cannabis, les États enregistrent une baisse significative du nombre d’admissions en traitement de santé mentale.
Les résultats semblent clairs : la légalisation du cannabis entraîne une diminution des admissions en santé mentale.
Ces résultats se sont avérés solides même lorsqu’il a contrôlé les différences entre les États dotés de lois sur le cannabis et ceux qui n’en ont pas. Par exemple, les États qui ont adopté des lois sur le cannabis récréatif ont tendance à avoir un accès plus large à Medicaid, ainsi que des lois préexistantes sur le cannabis médical. Ces facteurs pouvant également avoir un impact sur la santé mentale, Ortega les a pris en compte dans son analyse. Il a également pris en compte des facteurs démographiques tels que l’âge, la race, l’économie et la politique. Mais même avec ces contrôles, les principaux résultats sont restés inchangés.
Les résultats diffèrent selon les groupes démographiques
Au cours des premières années suivant l’adoption d’une loi sur le cannabis à usage récréatif, les États ont enregistré une baisse moyenne de 37 % des admissions dans les services de santé mentale. Les résultats sont restés relativement cohérents pour tous les groupes d’âge de moins de 65 ans, même le groupe le plus jeune (13-20 ans) ayant enregistré une réduction des admissions. La corrélation s’est également avérée relativement cohérente entre les hommes et les femmes, qui ont connu une réduction des admissions de 42 % et 37 %, respectivement.
C’est la race qui a entraîné les plus grandes différences de résultats. Les admissions de Noirs dans les services de santé mentale ont diminué de 27 %, contre une baisse de 9 % seulement pour les Blancs. Toutefois, les résultats des autres groupes raciaux sont moins homogènes. Pourquoi une race a-t-elle enregistré moins d’admissions qu’une autre ? Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre ce lien et ses causes.
Les personnes inscrites à Medicaid ont également obtenu des résultats plus importants. Toutefois, cela peut s’expliquer par le fait que les établissements déclarants comptent un grand nombre d’utilisateurs de Medicaid. Néanmoins, les deux groupes ont vu leur nombre d’admissions diminuer après la légalisation du cannabis.
Les résultats montrent une diminution des admissions, mais pas une amélioration de la santé mentale
On pourrait interpréter cette étude comme montrant que les libertés liées au cannabis améliorent directement la santé mentale des individus et conduisent donc à une diminution des admissions dans les services de santé mentale. Mais comme l’explique Ortega, « les voies contribuant à la diminution des admissions en traitement restent floues ». Il ne faut donc pas confondre les résultats avec une amélioration de la santé mentale ».
Les recherches futures devront se pencher sur les causes de ce lien. En effet, un certain nombre de théories différentes pourraient expliquer les données. Le cannabis peut contribuer directement à la santé mentale. Mais il est également possible que l’automédication par le cannabis dissuade une personne de chercher de l’aide, sans pour autant améliorer sa santé mentale. Des facteurs inconnus pourraient également être à l’origine de ces résultats.
L’une des principales limites de cette étude est qu’elle ne permet pas de savoir qui a consommé du cannabis et comment sa santé mentale s’est améliorée. Elle se contente d’examiner les tendances à grande échelle au niveau de la population. Elle ne peut pas remplacer la recherche médicale portant sur les effets de la consommation de cannabis sur la santé mentale. Ortega nous rappelle que ses résultats « concernent spécifiquement les admissions en traitement et ne doivent pas être confondus avec l’amélioration ou le déclin de la santé mentale ». Néanmoins, en ce qui concerne l’impact immédiat de la légalisation du cannabis sur le système de santé, les résultats semblent clairs : le cannabis légal entraîne une diminution du nombre d’admissions pour des raisons de santé mentale.
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