STUPÉFIANTS Une grande majorité des 250.000 personnes qui ont participé à une consultation citoyenne sur le cannabis « récréatif » plébiscitent la légalisation de cette drogue dont l’usage est interdit en France
Thibaut Chevillard
Publié le 02/03/2
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Du cannabis (illustration). — Libor Sojka/AP/SIPA
• La mission d’information sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis a été créée en janvier 2020. Depuis novembre 2020, les 33 députés qui la composent se sont intéressés au cannabis dit « récréatif » et ont auditionné environ 80 experts.
• Une consultation citoyenne sur l’usage du cannabis récréatif a également été lancée par les députés en début d’année 2021. 253.194 citoyens ont pris le temps de répondre en ligne aux questions des députés.
• Une très large majorité des votants plébiscite la légalisation de cette drogue dont l’usage est interdit en France.
« C’est un résultat qui montre que le sujet est important et qu’il suscite l’intérêt des Français. » Rapporteure thématique de la mission parlementaire sur le cannabis, la députée LREM du Loiret Caroline Janvier a été « surprise » du nombre de réponses à la consultation citoyenne sur l’utilisation récréative de ce produit. Entre le 13 janvier et le 28 février 2021, 253.194 personnes ont répondu à un questionnaire en ligne sur le site de l’Assemblée nationale. Et leur constat est sans appel : elles ne sont que 4,37 % à considérer que la loi permet aujourd’hui de limiter l’usage du cannabis et près de 80 % d’entre elles se prononcent en faveur d’une légalisation.
Qui sont les Français qui ont pris le temps de répondre aux neuf pages de questions de la mission d’information ? Essentiellement de jeunes âgés de 18 à 29 ans (46,96 %), ou de personnes âgées de plus de 40 ans (25,37 %). Certains consomment régulièrement ou tous les jours du cannabis (30,86 %), d’autres jamais (30,80 %).
Autoriser la culture du cannabis
Dans le détail, plus de neuf répondants sur dix estiment que la répression de la consommation de cannabis ne permet ni d’en limiter l’ampleur (92,07 %), ni de lutter efficacement contre les trafics (92,09 %). Une grande majorité des Français qui ont participé à cette consultation (80,80 %) proposent de légaliser le cannabis, quand 13,8 % d’entre eux se déclarent favorables à une dépénalisation. A l’inverse, une infime minorité des votants ont indiqué être pour un renforcement des sanctions (4,6 %) ou pour le maintien du cadre légal en vigueur (0,82 %).
Beaucoup imaginent une commercialisation du cannabis dans des boutiques spécialisées (62,4 %). D’autres suggèrent que sa vente soit régulée sur le modèle de l’alcool (24,2 %). Pour 8,6 % des votants, le cannabis pourrait être proposé dans les bureaux de tabac, quand 3,8 % d’entre eux estiment qu’il doit être en vente libre. Surtout, ils sont une immense majorité à être favorables à ce que l’État permette aux particuliers de cultiver eux-mêmes des plants dans des limites fixées par la loi.
« Légalisation ne veut pas dire banalisation »
Ces contributions vont alimenter le rapport de la mission d’information sur le volet « récréatif » du cannabis, qui devrait être présenté d’ici un mois. « Par ailleurs, les auditions de spécialistes que nous avons menées ont montré qu’il était possible de faire différemment », rappelle la députée du Loiret. « On peut notamment s’inspirer des expériences étrangères. Nous avons beaucoup de matière et d’outils pour formuler des propositions très concrètes, et montrer qu’en réalité, légalisation ne veut pas dire banalisation. Au contraire, avec un autre modèle, comme une légalisation régulée par l’État, on pourra mieux répondre aux problématiques sécuritaires et sanitaires. »
En quoi consiste l’expérimentation en France sur 3.000 patients ?
Pour Caroline Janvier, « la légalisation du cannabis n’est plus un tabou en France ». Reste à savoir si le président de la République sera sensible aux arguments développés par les députés dans leur rapport. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a rappelé lors d’un déplacement à Marseille son opposition morale à la légalisation du cannabis. Pour lutter contre les trafics dans les cités phocéennes, il a annoncé de nouveaux renforts policiers. Une idée qu’avaient déjà eue ses prédécesseurs et qui n’a pourtant jamais montré son efficacité, les réseaux démantelés par les enquêteurs étant remplacés dans l’heure par d’autres, comme l’a montré un récent article de La Provence concernant les Bouches-du-Rhône.
SOCIÉTÉ
Cannabis : « Il faut arrêter d’avoir une approche idéologique », estime la députée Caroline Janvier
Source : 20minutes.fr