Depuis des décennies, les défenseurs de la prohibition promettent un monde débarrassé des drogues grâce à la répression. Pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes : loin d’enrayer les trafics ou la consommation, la prohibition crée des paradoxes insoutenables, notamment en milieu carcéral, où elle est censée fonctionner « en vase clos ». Selon une récente enquête menée par l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) en 2023, 49 % des détenus ont consommé du cannabis au moins une fois en prison, et 26 % en consomment quotidiennement, soit un taux dix fois plus élevé que celui observé dans la population générale.
Face à ces données, une question s’impose : si la répression échoue déjà dans un espace ultra-surveillé, comment pourrait-elle réussir à l’échelle de la société ?
Les prisons, miroir de l’échec prohibitif
Les résultats de l’enquête ESSPRI (Enquête sur la santé et les substances en prison) montrent une réalité alarmante : la moitié des détenus consomme une substance illicite durant leur détention. Parmi eux, le cannabis est la drogue la plus consommée, surpassant largement d’autres substances comme la cocaïne ou les opioïdes.
Cette situation met en lumière l’inefficacité criante des mesures sécuritaires en milieu carcéral. Alors que la détention de stupéfiants est considérée comme une faute disciplinaire, les trafics perdurent, nourris par des rapports sociaux complexes entre détenus, personnels de surveillance et réseaux extérieurs.
Une utopie confrontée à la réalité
Les prohibitionnistes affirment que la répression peut endiguer la consommation et les trafics. Pourtant, en milieu fermé, où les conditions de contrôle sont drastiques, ces objectifs sont déjà hors d’atteinte. L’exemple des prisons prouve que la prohibition ne fait qu’alimenter des marchés clandestins, exacerber les tensions sociales et détourner des ressources publiques massives sans résultats probants.
Dans ces conditions, comment croire encore à une prohibition efficace à l’extérieur, où les moyens de contrôle sont nécessairement moins rigides ?
Comprendre les usages pour déconstruire les mythes
L’enquête ESSPRI révèle également que les motivations des consommateurs de cannabis en prison sont souvent liées aux conditions de vie difficiles en détention. Le cannabis est utilisé pour gérer le stress, trouver le sommeil ou atténuer l’anxiété, et non exclusivement à des fins récréatives. Ces usages témoignent d’un besoin de soutien sanitaire et psychologique bien plus que d’un défi aux autorités.
Plutôt que de persister dans une approche répressive, il est urgent de réorienter les politiques publiques vers la prévention, la réduction des risques et l’éducation. Ce changement de paradigme permettrait de reconnaître l’inefficacité de la prohibition et de privilégier des solutions pragmatiques et humanistes.
La prohibition, un outil de contrôle plus qu’une solution
La situation en milieu carcéral n’est pas seulement un échec logistique : elle illustre la véritable nature de la prohibition. Plus qu’un outil pour résoudre la question des drogues, elle est un mécanisme de contrôle social, ciblant en priorité les populations les plus vulnérables et exacerbant les inégalités.
Les consommateurs, qu’ils soient détenus ou non, ne sont pas responsables de la violence liée aux trafics. Celle-ci est la conséquence directe des politiques prohibitionnistes qui alimentent des marchés noirs et rendent impossible toute régulation.
La voie du CIRC : légalisation, pragmatisme et droits fondamentaux
Au CIRC, nous défendons une approche fondée sur la réalité des usages, le respect des libertés individuelles et la justice sociale. Les faits le prouvent : la prohibition n’a jamais fonctionné, ni en prison ni ailleurs. Il est temps de reconnaître son caractère criminogène et de mettre en place des politiques de régulation responsables, axées sur la santé publique et la sécurité.
Citer l’échec de la prohibition carcérale n’est pas une simple critique : c’est un appel à la raison. La légalisation régulée du cannabis et d’autres substances, accompagnée de politiques de réduction des risques, est la seule voie réaliste pour sortir de cette impasse et construire une société plus juste et plus sûre.
« La prohibition a le goût du sang.« – Comme nous le rappelons au CIRC, il est temps de sortir de cette utopie répressive qui coûte des vies et en détruit des milliers.
Références : Enquête ESSPRI 2023 – Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT).
Le cannabis au quotidien : pratiques, évolutions d’usage et régulation de la consommation – Le dernier rapport de l’OFDT – Novembre 2024
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