Le coordinateur national de la politique en matière de drogues, Jindrich Voboril, a déclaré que l’introduction d’un marché légal et réglementé du cannabis en République tchèque pourrait donner lieu à une action en justice devant la Cour européenne de justice.
Le coordinateur national de la politique en matière de drogues, Jindrich Voboril, a déclaré lors de la conférence Cannabis Summit qui s’est tenue à Prague le week-end dernier que l’introduction prévue d’un marché légal et réglementé du cannabis en République tchèque pourrait être portée devant la Cour européenne de justice. Toutefois, M. Voboril estime qu’il s’agit de la meilleure option, car il a été prouvé que la prohibition du cannabis ne fonctionne pas et n’engendre que des coûts et des risques.
Projet de proposition de marché réglementé du cannabis
L’avant-projet préparé par Voboril propose d’autoriser la culture domestique et commerciale du cannabis, la création de clubs spéciaux à usage récréatif et la vente sous licence dans les magasins aux personnes de plus de 18 ans.
La création d’un marché du cannabis strictement réglementé fait partie du plan de lutte contre la toxicomanie approuvé par le gouvernement en avril dernier. Ce plan prévoit également de renforcer la prévention et le traitement des addictions et d’augmenter les taxes sur les substances addictives.
Obstacles attendus et solutions possibles
M. Voboril espère que la Chambre des députés approuvera le projet de loi avant la fin de l’année afin que le marché réglementé puisse démarrer de préférence l’année prochaine.
Cependant, il a prévenu qu’étant donné la législation européenne et le fait que le gouvernement tchèque est actuellement le seul dans l’UE à envisager un marché commercial pour l’usage récréatif du cannabis, il est probable qu’un autre État membre conteste la mesure devant la Cour européenne de justice.
Si l’État tchèque perd le procès, ce qui pourrait prendre des années, il existe d’autres solutions, bien qu’elles soient moins favorables.
Paramètres et limites du changement prévu
Le coordinateur a également décrit certains paramètres attendus du changement prévu. L’accès au marché du chanvre dépendra d’une licence payante. Selon Voboril, il est prévu de faire payer environ 50 000 CZK ( environ 2100 €) par an pour une zone de culture de 200 mètres carrés, le même montant s’appliquant aux vendeurs.
Les pharmacies pourraient vendre du cannabis gratuitement, tandis que les particuliers pourraient le cultiver librement chez eux sur une surface maximale de trois mètres carrés.
Voboril n’a pas l’intention de limiter le nombre de licences délivrées, mais la coalition gouvernementale discute de la possibilité de limiter la surface par producteur afin d’éviter que le marché ne soit progressivement dominé par quelques grands acteurs.
Le coordinateur souhaiterait également introduire un système d’enregistrement des usagers et limiter la quantité de cannabis pouvant être achetée par mois.
Les experts évoquent les obstacles et les solutions possibles
Kai-Friedrich Niermann, juriste allemand et expert en réglementation européenne, a révélé que les ventes commerciales pourraient en effet poser problème au regard du droit international et européen.
Selon un accord international de 1961, la distribution de cannabis n’est possible qu’à des fins scientifiques et médicales, mais il a précisé que cette question pouvait être résolue, par exemple, en sortant de l’accord et en le signant à nouveau avec une réserve.
L’avocat a souligné que la législation européenne stipule également qu’il n’est pas possible de distribuer du cannabis sans raison. Mais si le cannabis est légalisé, ajoute-t-il, il existe une raison, et la vente peut donc être justifiée.
Le problème, et l’une des raisons pour lesquelles d’autres pays ont abandonné cette voie, réside toutefois dans la libre circulation des biens et des services, qui est l’un des piliers de l’UE. Si un seul pays ouvre le marché, cela pose un problème car les autres pays ne peuvent pas y participer, a fait remarquer M. Niermann.
Objections et avantages d’un marché réglementé
Sean Carney, l’organisateur de la conférence, a déclaré à CTK que les principales objections au projet de M. Voboril avaient été soulevées par le petit parti au pouvoir, les démocrates-chrétiens (KDU-CSL).
Il a toutefois souligné qu’ils devraient prendre en compte les données factuelles, qui montrent qu’il est préférable d’introduire un marché réglementé pour limiter les dommages, plutôt que de maintenir la situation actuelle où le cannabis peut être facilement acheté sur le marché noir, mais sans aucune garantie quant à sa sécurité ou au bénéfice économique pour l’État.
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