« Si le cannabis thérapeutique peut aider 20 à 30 % de patients, pourquoi s’en priver ? » clame le professeur Authier. (Illustration)
Publié le 8 Septembre 2020 | Par Florence Méréo
Psychiatre et pharmacologue, le professeur Nicolas Authier, s’inquiète dans une tribune que nous dévoilons, des conséquences d’un nouveau retard dans l’expérimentation du cannabis thérapeutique.
C’est la première fois que Nicolas Authier signe une tribune. Le professeur de pharmacologie veut interpeller : il n’est pas président du Comité scientifique sur le cannabis médical à l’Agence du médicament pour « faire illusion ». Mais pour que l’expérimentation pour les malades commence bien en janvier.
Quelle est votre crainte ?
NICOLAS AUTHIER. Qu’un nouveau report ne fige le projet! Le décret d’application, capital pour déterminer ce qui sera prescrit aux malades, n’est pas publié. Un arbitrage à 0 euros de financement a été rendu. Zéro! La colère, le désespoir se font sentir chez nos patients. Faut-il continuer à les laisser espérer? Les médecins ne sont pas là pour servir de caution politique, mais pour faire avancer les choses. Cette expérimentation doit avoir lieu, avec les moyens adaptés.
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A qui s’adresse-t-elle ?
A des patients avec une sclérose en plaques, des troubles musculaires sévères, de l’épilepsie… Le cannabis médical ne traite pas des caprices, mais des maux non soulagés par la médecine traditionnelle. Ce sont des gens en impasse thérapeutique. L’expérimentation de deux ans ouvre 3000 places. C’est le médecin qui prescrit, le pharmacien qui délivre. On parle là de médicament, pas de fumette de joint !
Quel apport du cannabis pour ces patients ?
Certaines substances interagissent avec le système de transmission de la douleur. Elles la soulagent ou modifient sa perception. Personne ne dit que c’est miraculeux. Mais si ça peut aider 20 à 30 % de patients, pourquoi s’en priver? Certains peuvent reprendre une vie sociale, retravailler…
Ses détracteurs redoutent une voie tracée à la légalisation du cannabis…
La morphine est un médicament, mais l’opium dont elle dérive n’est pas légalisé ! L’Allemagne, l’Irlande, l’Italie donnent accès à la voie thérapeutique, mais n’ont pas légalisé le cannabis. Notre démarche est indépendante : l’usage médical du cannabis n’est pas le cheval de Troie d’autres finalités.