Légalisation du cannabis : la consommation augmente à Montréal, mais pas chez les jeunes
La légalisation du cannabis au Québec en 2018 a suscité de nombreuses préoccupations et interrogations quant à son impact sur la consommation, en particulier chez les jeunes. Une étude menée par la santé publique de Montréal a examiné les conséquences de cette légalisation, mettant en lumière des résultats surprenants. Contrairement aux craintes initiales, les jeunes âgés de 15 à 24 ans ne consomment pas davantage de cannabis depuis sa légalisation. Au contraire, la consommation a augmenté principalement chez les adultes de 35 ans et plus.
L’évolution de la consommation depuis 2018
La Direction régionale de santé publique du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal s’est appuyée sur les données de l’enquête québécoise sur le cannabis pour suivre l’évolution de la consommation de cannabis et des pratiques associées. Depuis la légalisation en octobre 2018, la consommation de cannabis à Montréal est passée de 17 % en 2018 à 23 % en 2022. Cependant, cette augmentation n’affecte pas les jeunes, de 15 à 24 ans, comme on le craignait.
Natalia Gutierrez, agente planification, programmation, recherche à la Direction régionale de santé publique du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, souligne que la consommation est restée stable chez les 15-24 ans. C’est une nouvelle rassurante pour la communauté, car les préoccupations concernant la consommation de cannabis par les jeunes étaient nombreuses avant la légalisation. La consommation reste la plus élevée parmi les Montréalais de 18 à 24 ans (38 %) et de 35 à 53 ans (37 %).
Consulter l’étude : La consommation de cannabis à Montréal suivant la légalisation
Différences entre les sexes
Les données montrent également que les hommes montréalais sont plus enclins à la consommation de cannabis que les femmes. En 2022, 25 % des répondants de 15 ans et plus ont déclaré avoir consommé du cannabis au cours des 12 derniers mois, contre 21 % chez les femmes. En 2018, ces chiffres étaient respectivement de 21 % chez les hommes et de 14 % chez les femmes.
Fréquence de consommation stable
La fréquence de consommation de cannabis est restée relativement stable malgré l’augmentation du nombre de consommateurs. En 2018, 16 % des consommateurs déclaraient en faire un usage quotidien, contre 12 % en 2022. Les consommateurs réguliers sont restés à 23 %, tandis que les occasionnels sont passés de 18 % à 21 % au cours de la période étudiée. La catégorie la plus importante de consommateurs, ceux qui utilisent le cannabis moins d’une fois par mois, est restée stable à 44 %, avec une augmentation de seulement un point de pourcentage depuis 2018.
Natalia Gutierrez note que l’on aurait pu s’attendre à ce que la légalisation entraîne une augmentation du nombre de consommateurs réguliers, mais cela ne s’est pas produit, les habitudes de consommation restant inchangées.
Diversification des modes de consommation
La légalisation du cannabis a apporté une diversification des modes de consommation. Alors que fumer du cannabis reste la méthode de consommation la plus courante, sa popularité a diminué de 13 % entre 2018 et 2022, passant de 93 % à 80 %. Les produits comestibles sont devenus populaires (36 %), suivis des gouttes orales (34 %), des boissons (21 %), du vapotage (20 %), des vaporisateurs (19 %) et des capsules (17 %).
Les boissons et les gouttes orales ont enregistré les plus fortes augmentations de popularité, passant respectivement de 6 % à 21 % et de 17 % à 34 % entre 2018 et 2022. Les données de 2019 et 2022 montrent qu’il n’y a pas eu de changements statistiquement significatifs dans la proportion de consommateurs de cannabis qui déclarent vaporiser, passant de 16 % à 20 %.
La montée en puissance de la SQDC
En ce qui concerne les sources d’approvisionnement, de plus en plus de consommateurs se sont tournés vers la Société québécoise du cannabis (SQDC) pour acheter leur cannabis. La proportion de consommateurs s’approvisionnant à la SQDC est passée de 46 % en 2019 à 68 % en 2022.
Cependant, il est important de noter que cette augmentation est principalement observée chez les 21 ans et plus, car l’achat légal de cannabis est interdit aux moins de 21 ans au Québec. Pour les jeunes de 15 à 20 ans, les membres de la famille, les amis et les connaissances restent les principales sources d’approvisionnement pour 79 % des répondants.
La diminution de l’achat sur le marché illicite est une tendance claire au cours de la période étudiée, passant de 28 % en 2018 à seulement 7 % en 2022.
Évolution des perceptions
La légalisation du cannabis a eu un impact sur l’acceptabilité sociale de cette substance autrefois illégale. En 2018, 47 % des répondants à Montréal estimaient qu’il était acceptable de consommer du cannabis à des fins récréatives. En 2022, ce chiffre a augmenté à 63 %.
Il est à noter que la perception du risque pour la santé lié à la consommation de cannabis a évolué dans la population montréalaise. En 2018, 25 % des répondants pensaient que la consommation occasionnelle de cannabis ne présentait aucun risque pour la santé, tandis qu’en 2022, seulement 21 % partageaient cet avis.
De plus, le pourcentage de répondants déclarant avoir conduit un véhicule moins de deux heures après avoir consommé du cannabis a diminué de 50 %, passant de 18 % en 2018 à 9 % en 2022.
L’Enquête québécoise sur le cannabis est menée chaque année depuis 2018 par l’Institut de la statistique du Québec. Les données sont collectées auprès de la population de 15 ans et plus et sont basées sur des déclarations personnelles dans la population québécoise. Cette étude offre un aperçu précieux de l’impact de la légalisation du cannabis sur la consommation et les perceptions à Montréal.
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