Pour relever l’économie française après la crise sanitaire, une vingtaine de députés et médecins proposent de légaliser le cannabis.
Création d’emplois et gros sous dans les caisses de l’État : et si la légalisation du cannabis offrait une solution à la crise économique engendrée par la pandémie ? C’est le point de vue partagé par une vingtaine de députés de tous bords (LREM, EELV, UDI, LFI, LR) et des médecins qui signaient le 18 juin dernier une tribune en ce sens, publiée sur le site de L’Obs.
Relancer l’économie après la pandémie
En 2019, François-Michel Lambert, député écologiste des Bouches-du-Rhône à l’initiative de la tribune, avait déjà déposé une proposition de loi en faveur de la légalisation du cannabis. La crise du coronavirus n’a fait que renforcer ses convictions. Pour l’élu, cette légalisation pourrait s’inscrire dans un monde d’après plus égalitaire et prospère.
« La légalisation permettrait de faire rentrer chaque année dans les caisses de l’État entre 2 et 2,8 milliards d’euros et elle créerait entre 30 000 et 80 000 emplois », peut-on lire en ouverture de la tribune. Une manne financière dont on aurait tort de se priver à l’heure où l’économie française se trouve largement impactée par la crise du COVID-19.
Il est urgent de faire évoluer la législation sur le cannabis martèle François-Michel Lambert : « c’est maintenant qu’il faut légaliser et pas en 2023 après les élections. (…) Cela nous permettrait de sortir de l’impasse sur la consommation, la répression et la santé tout en assurant un contrôle de l’État et des rentrées d’argent conséquentes dont nous avons plus que jamais besoin. »
Soulager le système de santé et la police
En effet, aujourd’hui, 5 millions de Français consomment occasionnellement du cannabis et 1 Français sur 18 en âge de fumer en fume quotidiennement. Les produits se sont fortement dégradés en termes de qualité (produits frelatés, coupés ou au taux de THC de plus en plus élevé), c’est donc une question de santé publique rappelle l’élu. « La prohibition, c’est laisser les citoyens consommer des produits qui sont parfois mortels ».
« Légaliser, c’est maîtriser la distribution du produit, sa composition tout en permettant de développer de vraies politiques de santé publique, de prévention et d’accompagnement à destination des usagers », expliquent les signataires dans leur tribune. Une façon de « faire baisser la pression sur le système de santé et sur la police », précise François-Michel Lambert.
« La crise du COVID-19 nous incite à nous recentrer sur l’essentiel. La police n’a pas que ça à faire de courir après les dealers et les consommateurs. » Chaque année, 120 000 infractions sont déférées devant la justice. Cela représente un coût estimé entre 550 et 700 millions d’euros par an dans les secteurs de la justice et de la police. Des sommes qui, si le cannabis était légalisé, pourraient permettre de soutenir les territoires perdus aux mains des trafiquants.
Sortir les « territoires perdus » de l’impasse du trafic
La légalisation anéantirait de fait l’économie de certains quartiers qui repose principalement sur le trafic de cannabis. Quel avenir pour leurs habitants ? Un des principaux arguments des anti-légalisation tourne justement autour de cette question. Légaliser reviendrait, selon eux, à abandonner ces territoires.
Pour François-Michel Lambert, c’est tout le contraire : « Emmanuel Macron est assit depuis deux ans et demi sur le rapport Borloo qui s’interroge justement sur la façon de redonner une place dans la République à ces quartiers. Et ce qu’il faut pour y parvenir, ce sont des moyens. Or, on tirerait 2 à 3 milliards d’euros de recettes fiscales de la légalisation du cannabis. Ce serait un choix politique d’enclencher le plan Borloo pour financer la relance dans les quartiers afin de redonner espoirs et perspectives à leurs habitants. »
Une légalisation à l’horizon 2021 ?
Les signataires de la tribune demandent une légalisation du cannabis à échéance 2021 qui « contribuerait à sécuriser l’ensemble de la population sur un plan sanitaire et les consommateurs en premier. »
Enfin, alors que le Luxembourg s’apprête à devenir le premier pays européen à légaliser la culture, le commerce et la consommation du cannabis à usage récréatif, le texte dénonce « l’absurdité de notre système ». « Il n’y a pas de frontière réelle entre la France et le Luxembourg. On pourra donc acheter du cannabis d’un côté de la rue et se faire verbaliser après l’avoir traversée… Je n’aimerais pas être le policier frontalier qui devra gérer cette situation », ironise François-Michel Lambert.
Le monde d’après sera-t-il plus vert ? Pour découvrir la tribune dans son intégralité, c’est par ici.
Par Mathilde Sallé de Chou – 5 août 2020