L’édito de Paul Quinio
Les descentes massives de policiers dans les quartiers rongés par le deal sont très utiles pour la communication du gouvernement… moins pour endiguer à long terme l’explosion du trafic. Et évitent tout débat sur la dépénalisation.
Il y a trop de morts liés au trafic de drogue. Trop de jeunes blessés lors de règlements de compte. Trop d’insécurité au quotidien pour la population de ces quartiers où les trafiquants ont installé leurs points de deal. Mais partager cet état des lieux sur les drames ou les conséquences néfastes du trafic de drogue n’empêche en rien de questionner l’orientation des politiques publiques censées y mettre fin. Le journal la Provence a eu raison de le faire au lendemain du déplacement surprise d’Emmanuel Macron à Marseille courant mars. Et heureusement que les choses sont rentrées dans l’ordre après les pressions exercées sur la direction du journal. Libération à son tour s’interroge sur la pertinence de la stratégie des ministères de l’Intérieur et de la Justice. Dans ces deux maisons, des voix s’élèvent pour dénoncer le côté très com de ces opérations baptisées «Place nette XXL».
Mais, au-delà de cette critique sur la mise en scène par l’exécutif de ces descentes dans les quartiers gangrenés, la vraie question est celle de leur efficacité. Et, là aussi, de nombreux policiers et magistrats se montrent sceptiques. Ils pensent que les trafics, après s’être déplacés pendant quelque temps dans un autre quartier, à quelques centaines de mètres, reprendront aussi vite qu’ils se sont arrêtés. Surtout, d’aucuns estiment que ces opérations «coup de poing» à forte visibilité entravent des enquêtes plus discrètes qui visent davantage les gros bonnets installés à la tête de réseaux internationaux que des petits délinquants en bout de chaîne.
Enfin, le gouvernement a opté pour une stratégie répressive unijambiste, mettant sous le tapis tout débat sur la dépénalisation de la consommation de drogues douces, à l’inverse de nombreux Etats américains ou, pour donner un exemple très récent, de l’Allemagne. La France préfère, elle, s’accrocher avec ses «Places nettes XXL» à un discours et des méthodes qui ont démontré leur inefficacité. Incompréhensible.
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