Rencontre avec le neurobiologiste montpelliérain Joël Bockaert qui animera une conférence intitulée “Le cannabis, quelle histoire”, ce lundi 6 novembre, à la salle Rabelais.
Auteur de plus de 500 publications, Joël Bockaert, spécialiste en neuropharmacologie et professeur émérite de l’Université de Montpellier, avait publié un ouvrage intitulé “Le cannabis, quelle histoire”, en 2021. Il y rappelait que le chanvre est « une des plus vieilles plantes du monde, peu consommatrice d’eau et peu sujette aux maladies, et donc très bien adaptée à notre époque ».
Il soulignait aussi « les multiples usages qu’on peut en faire : papier, textile, isolant, biodiesel, plastique ». Mais la France, qui est redevenue un important pays producteur de chanvre, est toujours très frileuse à l’idée de légiférer sur le cannabis.
Quelle est la situation du cannabis en France ?
On est le pays européen qui réprime le plus sa consommation, et celui où on en consomme le plus ! Je comprends qu’il soit difficile de légaliser le cannabis récréatif, car il s’agit d’une drogue avec les addictions qui vont avec. Mais les pays qui l’ont fait ne le regrettent pas. Au Canada, qui l’a légalisé en 2018, la vente illégale a chuté de 31 à 7 %. C’est important, car on ne sait pas trop ce qu’on achète, dans la rue.
Regrettez-vous cet immobilisme en France ?
Je regrette surtout qu’un vrai débat soit impossible sur ce sujet. Il montrerait pourtant que les avantages de la légalisation sont bien plus importants que les inconvénients, avec tous les problèmes d’addiction, de trafic et de violence que l’on connaît.
Qu’en est-il du cannabis thérapeutique ?
21 pays sur 27 en Europe l’ont déjà légalisé. On pourrait commencer par celui-là. D’autant qu’une expérimentation sur le cannabis médical montre des résultats positifs, et notamment pas d’effets secondaires ou addictifs. Elle est menée en France depuis mars 2021 sur près de 3 000 patients qui souffrent d’épilepsie réfractaire à tout traitement, de douleurs cancéreuses, de crampes liées à la sclérose en plaques, et de soins palliatifs. J’espère vraiment qu’on avancera sur ce sujet, malgré les réticences des Académies de médecine et de pharmacie sur le sujet. Car actuellement, on a des patients qui s’automédicalisent, et ça peut être dangereux. Sur ce sujet, il n’y a pas de raison d’être plus méfiants que les autres pays européens.
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« Le cannabis, quelle histoire ! » de Joël Bockaert, disponible en librairie.