Par Jean-Guillaume Bayard
Depuis près d’un demi-siècle, le cannabis consommé à travers le monde est devenu beaucoup plus fort avec une concentration en THC qui a explosé depuis 50 ans. Ce qui augmente les risques pour la santé des consommateurs de cette drogue.
Le cannabis qui circule actuellement à travers le monde est bien plus fort que celui des générations précédentes. Une étude menée à partir de 80 000 échantillons collectés aux États-Unis, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en France, au Danemark, en Italie et en Nouvelle-Zélande révèle que le taux de THC (Tétrahydrocannabinol, la substance active de la marijuana, NDLR) est monté en flèche. Les résultats de l’étude menée par une équipe de chercheurs de l’Addiction and Mental Health Group de l’université de Bath (Royaume-Uni) ont été présentés le 7 novembre dans la revue Addiction.
La concentration de THC a augmenté de 14% en près de 50 ans
Les chercheurs ont étudié comment les concentrations de THC ont évolué entre 1970 et 2017. Ils ont constaté que celles-ci ont grimpé de 14% durant de cette période, principalement en raison à la découverte de nouvelles variétés plus fortes que le cannabis à base de plantes traditionnelles qui contient plus de graines et moins de THC. Les chercheurs ont constaté que les augmentations de THC sont particulièrement élevées pour la résine de cannabis, ces dernières augmentant de 24% entre 1975 et 2017. “La résine de cannabis – ou ‘hasch’ – est souvent considérée comme un type de cannabis plus sûr, mais nos résultats montrent qu’elle est maintenant plus forte que cannabis à base de plantes, ajoute Sam Craft, co-auteur de l’étude. Traditionnellement, la résine de cannabis contenait des quantités beaucoup plus faibles de THC avec des quantités égales de CBD, mais les concentrations de CBD sont restées stables car le THC a considérablement augmenté, ce qui signifie qu’il est maintenant beaucoup plus nocif qu’il y a de nombreuses années.”
Cette augmentation de la concentration de THC n’est pas sans conséquence pour la santé. L’équipe a précédemment trouvé des preuves cohérentes que la consommation fréquente de cannabis avec des niveaux plus élevés de THC comporte un risque accru de problèmes tels que la dépendance et les troubles psychotiques. “À mesure que la force du cannabis a augmenté, le nombre de personnes qui suivent un traitement pour des problèmes de consommation de cannabis augmente également”, a observé le Dr Tom Freeman, directeur du groupe sur la toxicomanie et la santé mentale à l’Université de Bath et auteur principal de l’étude.
Les chercheurs plaident pour une stratégie préventive similaire à l’alcool
Les chercheurs ne sont pas intéressés uniquement au THC mais également au CBD, le cannabidiol, un autre cannabinoïde qui n’a pas d’effet psychoactif. Cette molécule est généralement utilisée pour ses vertus médicales. Des chercheurs américains ont récemment avancé que le CBD réduirait les lésions pulmonaires chez les patients atteints de la Covid-19. Contrairement au THC, les chercheurs n’ont trouvé aucune preuve de changements pour le CBD dans le cannabis au fil du temps.
Le cannabis reste la drogue illicite la plus consommée au monde malgré sa légalisation en Uruguay, au Canada et dans certains États américains. Les chercheurs soutiennent que l’augmentation de la force du cannabis met en évidence la nécessité de mettre en œuvre des stratégies plus larges de réduction des méfaits similaires à celles utilisées pour l’alcool. “À mesure que la force du cannabis a augmenté, les consommateurs sont confrontés à des informations limitées pour les aider à surveiller leur consommation et à guider les décisions concernant les avantages et les risques relatifs, affirme Tom Freeman. L’introduction d’un système d’unités standard pour le cannabis – similaire à l’alcool – pourrait aider les gens à limiter leur consommation et à l’utiliser de manière plus sûre.”
Source : Pourquoidocteur.fr