En Italie, la prohibition du cannabis connaît un regain d’intensité inquiétant. Entre la tentation d’interdire à nouveau le CBD et ses dérivés et la réforme du Code de la route qui impose une suspension de permis de trois ans en cas de test salivaire positif – sans même devoir prouver une altération au volant –, les consommateurs italiens subissent une attaque frontale sur leurs droits. C’est dans ce contexte que l’initiative singulière du département des dépendances de l’USL 2 de Trévise vient renforcer un climat déjà marqué par une stigmatisation croissante des usagers.
Une dérive paternaliste et stigmatisante
Le programme de Trévise propose d’échanger l’abstinence au cannabis contre des récompenses matérielles et financières. Chaque semaine, des jeunes entre 18 et 25 ans sont soumis à des tests d’urine : un résultat négatif leur donne droit à un billet de loterie, voire à des bons d’achat pouvant atteindre 250 euros.
Cette approche, loin de relever d’un véritable accompagnement thérapeutique, repose sur une logique infantilisante et coercitive. Elle nie l’autonomie des individus et réduit l’intervention sanitaire à un vulgaire système de carottes et de bâtons. En stigmatisant les consommateurs de cannabis, elle perpétue une vision moralisatrice et dépassée, ignorant les principes fondamentaux de la réduction des risques et des dommages.
Un échec de plus pour la prohibition
Ce type de politique n’est pas isolé : il s’inscrit dans un modèle prohibitionniste déjà largement discrédité. Partout où elle s’applique, la prohibition échoue à répondre aux véritables enjeux de santé publique, alimentant au contraire la marginalisation, les discriminations et les violences.
L’initiative de Trévise illustre surtout un paradoxe criant : tandis que les chiffres montrent que la majorité des problèmes liés aux addictions concerne des adultes marginalisés, ces politiques continuent de cibler les jeunes, souvent usagers occasionnels, en les criminalisant.
De plus, ce programme reflète le désarroi d’un système incapable de proposer des solutions structurelles. Utiliser des incitations économiques pour « acheter » la sobriété revient à admettre l’échec total des approches répressives.
Pourquoi la France doit se sentir concernée
Bien que le CIRC concentre son action sur la France, il est crucial de rester vigilants face aux dérives prohibitionnistes chez nos voisins européens. Les tentatives italiennes de criminaliser toujours plus les consommateurs – que ce soit par des interdictions absurdes sur le CBD ou des lois autoritaires sur la conduite – pourraient facilement inspirer des législateurs français (souvent addictent à la répression) tentés par un retour en arrière.
D’ailleurs, sur le plan des lois autoritaires concernant, entre autres, le cannabis au volant, la France n’est pas en reste : chez nous aussi, un simple test positif aux traces de THC, sans démonstration d’altération, peut entraîner une suspension immédiate de permis, même si le consommateur n’était plus sous l’effet de la substance au moment des faits. Sur ce point, nous ne sommes pas loin de la situation italienne.
Pour une coordination européenne des antiprohibitionnistes
Face à ces attaques répétées, le CIRC appelle à une coordination européenne des mouvements antiprohibitionnistes. Seule une mobilisation collective à l’échelle du continent peut permettre de contrer efficacement l’influence des lobbys prohibitionnistes et moralistes qui s’opposent à la réforme des politiques sur les drogues.
Ensemble, construisons un modèle basé sur la réduction des risques, l’éducation et le respect des libertés individuelles. La prohibition est une impasse qui ne fait qu’aggraver les injustices. Nous devons nous unir pour défendre un avenir où les politiques sur le cannabis soient fondées sur des preuves, et non sur des préjugés.
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