Le 6 octobre 2022, le président Joe Biden a émis une demande qui pourrait révolutionner le paysage de la politique sur le cannabis aux États-Unis. Il a chargé le secrétaire à la Santé et aux Services sociaux, Xavier Becerra, et le procureur général, Merrick Garland, d’entamer un processus administratif pour réexaminer la classification du cannabis en vertu de la loi fédérale. Actuellement classé comme une substance de l’annexe I, aux côtés de substances telles que l’héroïne, le LSD et la méthamphétamine, cette révision pourrait déplacer le cannabis vers l’annexe III de la loi sur les substances contrôlées. Une telle reclassification aurait des répercussions significatives sur l’industrie du cannabis, en particulier en éliminant le fardeau financier de l’article 280E du Code de l’IRS.
Alors que le secteur du cannabis attend avec impatience la réponse de l’Administration américaine de lutte contre la drogue (DEA) à la recommandation du Département de la Santé et des Services sociaux (HHS), de nombreuses questions subsistent quant à l’impact possible de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 sur cette révision.
La Convention unique sur les stupéfiants de 1961
La Convention unique sur les stupéfiants est un traité international conçu pour unifier les traités multilatéraux existants et réglementer la production de substances narcotiques, y compris le cannabis et la résine de cannabis. Signée par 61 pays et comptant 154 parties prenantes, la Convention inclut les États-Unis, le Canada et l’Uruguay, tous ayant légalisé le cannabis au niveau fédéral.
Shane Pennington, associé chez Porter Wright Morris & Arthur LLP et expert en droit du cannabis, souligne que la Convention unique pourrait constituer un obstacle à la reclassification du cannabis par la DEA. Il explique que la DEA pourrait rejeter la recommandation du HHS si elle estime que la Convention exige le maintien du cannabis en annexe I.
Cependant, Pennington est optimiste quant à l’issue de cette situation, en soulignant que le soutien du président Biden et du HHS à la reclassification, malgré la Convention, pourrait l’emporter.
L’exemple du Canada et de l’Uruguay
L’Uruguay a ouvert la voie en 2013 en devenant le premier pays à légaliser la culture, la vente et la consommation de marijuana. Martin Vidal, l’envoyé de l’Uruguay à Ottawa, estime que son pays a ouvert la voie à d’autres nations, notamment le Canada.
Le Canada a légalisé le cannabis au niveau fédéral en 2018, ce qui a suscité des réactions de l’Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS), créé par la Convention unique. L’OICS a exprimé ses regrets concernant la légalisation canadienne du cannabis à des fins non médicales et a averti que cela affaiblissait le cadre juridique international de contrôle des drogues.
Cependant, Lucas Richert, professeur d’histoire de la pharmacie à l’Université du Wisconsin-Madison, note que malgré les critiques initiales, les répercussions politiques importantes ou les sanctions majeures ne se sont pas matérialisées. Il explique que l’OICS a depuis adopté une position plus souple et a suggéré des alternatives à la prohibition totale, telles que la dépénalisation et la décriminalisation.
Le rôle de l’ONU et de l’OICS
L’ONU et l’OICS ont joué un rôle clé dans la création de la Convention unique sur les stupéfiants en 1961. James H. Mills, professeur d’histoire moderne à l’Université de Strathclyde à Glasgow, souligne que la Convention était un effort pour intégrer divers accords signés sous la Société des Nations, créée après la Première Guerre mondiale.
Mills estime que la Convention, conçue pour donner un sens aux efforts de régulation internationale des drogues, peut sembler dépassée aujourd’hui. Il considère que l’OICS est devenu moins efficace dans la condamnation des politiques nationales en matière de drogues.
Répercussions potentielles pour les États-Unis
Si les États-Unis décident de reclasser le cannabis en annexe III malgré la Convention unique, cela pourrait avoir peu de répercussions pour le pays, mais cela mettrait en évidence les limites de l’OICS et de l’ONU dans le domaine de la régulation des drogues. Cependant, il est important de noter que des compromis sont possibles, car l’OICS a reconnu que des mesures telles que la décriminalisation et la dépénalisation peuvent être conformes aux conventions de contrôle des drogues.
En fin de compte, la révision de la classification du cannabis aux États-Unis est un processus complexe qui doit tenir compte de divers facteurs, notamment les obligations internationales et les évolutions politiques nationales. La décision finale de la DEA et les réponses de l’OICS et de l’ONU restent à surveiller.
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