Dès la rentrée, ces amendes qui sanctionnent la possession de cannabis et de cocaïne vont être développées à l’échelle nationale. Une alternative à la garde à vue.
Désengorgement des tribunaux, allègement des procédures, fragilisation des points de revente… Le Premier ministre Jean Castex, qui entend amplifier la lutte contre le trafic de drogue sur le territoire, a annoncé samedi depuis Nice son intention de généraliser, « dès la rentrée », les amendes forfaitaires visant les usagers de stupéfiants. Le Parisien détaille ce dispositif initié sous le mandat de Gérard Collomb en 2018, et testé depuis quelques semaines dans plusieurs villes telles que Rennes, Reims, Lille ou Créteil.
Quel est le montant de cette amende ?
Si cette amende n’est pas réglée, le contrevenant s’expose à un jugement lors duquel il encourt jusqu’à un an de prison et 3750 euros d’amende . Il s’agit d’un dispositif similaire à celui existant pour les délits de conduite. Le détenteur de stupéfiants verra donc, lui aussi, cette condamnation inscrite sur son casier judiciaire.
Quelle quantité de drogue est concernée ?
Une note diffusée le 8 juillet par le ministère de l’Intérieur évoque deux quantités différentes : l’usager ne doit pas se trouver en possession de plus de 10 g de cocaïne ou de 100 g de cannabis pour faire l’objet d’une simple amende. Dans les faits, « la politique pénale est propre à chaque procureur », souligne auprès du Parisien la police nationale. Chaque magistrat a ainsi le loisir d’adapter ces quantités.
À Lille, un policier nous confirme qu’elles sont les mêmes que celles avancées par Beauvau. Quant à Reims, seule la possession de résine de cannabis peut faire l’objet d’une amende, et uniquement pour une quantité ne dépassant pas les 20 g, rapporte le procureur de la République, Matthieu Bourrette, qui recense déjà une trentaine d’amendes infligées depuis un mois. Autre exemple à Créteil, où la dose ne doit pas dépasser les 30 g.
Qui peut être sanctionné ?
Ce dispositif d’amende ne vise que les détenteurs majeurs, en capacité de présenter une pièce d’identité et de donner une adresse valide. Les conditions sont nombreuses : il ne doit faire l’objet de plus de trois antécédents judiciaires en lien avec l’usage de stupéfiants, doit reconnaître les faits, accepter de remettre le produit et que ce dernier soit détruit.
« Il ne faut pas que cette possession soit connectée à une autre infraction, donc il faut que l’interpellation se passe bien, qu’il n’y ait pas d’outrage, pas de rébellion, pas d’ivresse… », énumère aussi Frédéric Gallet, délégué Alliance Police à Rennes, qui déplore un « cadre d’emploi très limité », mais aussi un risque de « banalisation du produit stupéfiant ». Selon lui, depuis la mise en place du dispositif le 16 juin dans la ville bretonne, seules très peu d’amendes ont été dressées en raison de ces nombreuses conditions à respecter.
Comment se déroule la procédure ?
Toute la procédure doit se dérouler, si la sécurité des policiers ou gendarmes n’est pas en jeu, sur le lieu de l’interpellation. Une fois que les forces de l’ordre constatent que la personne se trouve bien en possession de drogue (s’il s’agit de cocaïne, elle doit être testée à l’aide d’un kit) et qu’elle remplit toutes les conditions requises pour être éligible à une amende, elles peuvent dresser un procès-verbal numérique. Le tout se fait sur une tablette ou un smartphone NEO (pour nouveaux équipements opérationnels), permettant au policier ou au gendarme de vérifier instantanément les antécédents judiciaires de l’usager. À Rennes, le procès-verbal est ensuite géré par le Centre national du traitement automatisé des infractions routières, qui se charge d’encaisser les amendes.
Mais le dispositif connaît des débuts difficiles dans le Nord par exemple. « Nos collègues n’ont pas les moyens nécessaires : certaines tablettes, qui doivent disposer d’une mise à jour spéciale pour effectuer ces nouveaux procès-verbaux, n’ont pu en bénéficier car les informaticiens sont en vacances », témoigne Serge Viseur, délégué Alliance police à Tourcoing et Roubaix.
Quel est l’objectif de cette amende ?
Ce délit forfaitisé « permettra aux forces de l’ordre de verbaliser plus simplement l’auteur d’un délit et pour l’autorité judiciaire d’appliquer une sanction sans délai », a martelé samedi Jean Castex, alors que l’Hexagone recense 900 000 usagers quotidiens de cannabis en 2020.
Source : Leparisien.fr