Comment vit-on le confinement quand on est fumeur de cannabis ? Alors qu’une étude nationale se penche sur le sujet, des consommateurs de Toulouse se confient sur leur quotidien.
« J’avais des réserves, un petit stock. Il m’en reste encore un peu, mais plus beaucoup… ». Comme des milliers d’usagers de cannabis soumis au confinement, Léa (*), une Toulousaine de 25 ans, traverse la période avec plus ou moins de philosophie.
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« Quand j’en aurai plus, j’en aurai plus… »
Les pratiques de cette intermittente du spectacle n’ont guère changé depuis la mi-mars :
Je fume le soir, tranquillou, de manière récréative, en général un [joint] par jour. Pour moi, c’est comme boire un verre de vin Je sais que je peux facilement m’en passer. Et quand j’en aurai plus, j’en aurai plus…
Les shiteux et le confinement. C’est le sujet d’une (très sérieuse) étude nationale lancée la semaine dernière, en ligne, par un laboratoire de l’Inserm, à Marseille (Bouches-du-Rhône). Baptisée Cannavid, elle aurait déjà reçu près de 4 000 réponses en l’espace de quatre jours, selon Le Parisien. Un véritable carton.
« Plus tendu au départ »
Les consommateurs quotidiens de cannabis représenteraient près d’un million de personnes en France. Combien sont-ils à Toulouse ? Et comment vivent-ils cette période si particulière ? Éric a 20 ans et vit dans la Ville rose. Il se confie :
Avant le confinement, j’étais un ‘bon’ consommateur. Je fumais 4-5 joints par jour en moyenne. Depuis, j’ai dû arrêter complètement. Je peux très bien m’en passer et ça n’a pas vraiment altéré mon humeur. J’étais peut-être un peu plus tendu, au départ, mais c’est vite passé.
Boulot, console, joint
Jose, un Toulousain de 29 ans, fume de l’herbe depuis qu’il est ado. « J’avais prévu un petit stock en vue du confinement, concède-t-il. Je vis seul. Je savais qu’en étant enfermé à la maison, en dehors de mon boulot [en télétravail] et de la console, je n’aurais que ça à faire ». Mais il se rationne :
Je ne me suis pas jeté dessus comme un glouton. En fait, je me considère davantage comme un weed lover (amateur d’herbe, ndlr). J’aime le goût de l’herbe. Je suis un fêtard. Je n’ai pas les mêmes problèmes qu’un gars qui s’envoie vingt pétards par jour. J’ai toujours caché à tout le monde que je fumais du cannabis, ça ne m’a pas empêché de faire des études et d’avoir un boulot. Et demandez à mes potes si j’ai des problèmes de mémoire !
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Livraisons à domicile
Les moins prévoyants (ou les plus gourmands) doivent quand même passer par la case ravitaillement. Pas si simple. Le cannabis ne figure pas parmi les produits de première nécessité sur les attestations dérogatoires de déplacement.
« En fait, ce n’est pas si compliqué. Il y a même encore des livraisons à domicile », glisse Jose. Les réseaux Twitter ou Snapchat fourmillent d’annonces en la matière. Kad, un étudiant de 20 ans, a renoncé à faire le plein :
Depuis le confinement, je vis avec mes parents, donc pas question de me faire livrer à domicile ! ça fait environ un mois que je me passe de cannabis. En temps normal, je fume environ 5 ou 6 joints par semaine. Au départ, ça m’a un peu manqué mais je m’y suis fait, et je n’ai pas la sensation d’avoir compensé par autre chose. Je sais aussi que certains, en étant coincés chez eux à ne rien faire, en consomment davantage.
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« Bien meilleur marché qu’à Paris »
Produit illégal (faut-il le rappeler), le cannabis est soumis aux aléas de l’économie de marché. « L’un de mes collègues en vend et il s’est retrouvé en rupture de stock. Il a mis un certain temps à trouver un nouveau fournisseur », constate Kad.
Moins de matos disponible (pression policière sur les trafiquants, fermeture des frontières suite à la crise du coronavirus) et demande en hausse (du fait du confinement) font grimper les prix. « En ce qui concerne l’herbe, Toulouse reste quand même deux fois moins cher que Paris« , apprécie le weed lover autoproclamé.
Des prix multipliés par deux
Éric, qui a stoppé toute conso, détaille :
Avant le confinement, je dépensais 130 euros par mois en cannabis. Depuis, les prix ont très fortement augmenté. Les 10 g étaient à 70 euros. Aujourd’hui, ça peut monter jusqu’à 150 euros.
Et gare aux arnaques. Léa se marre : « Un ami à moi, qui n’en a pas l’habitude, s’est fait livrer à domicile. Il s’est rendu compte, mais trop tard, qu’on lui avait vendu du CBD », la version non psycho-active du chanvre. Moins… fun ?
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(*) Tous les prénoms ont été modifiés
Source : actu.fr