Les règlements de comptes sanglants s’enchaînent quartier des Izards, à Toulouse, sur fond de contrôle du trafic de stups : depuis le 10 août 2020, deux hommes sont morts et quatre autres ont été blessés par balle.
Publié le 25 Août 2020 | Par Actu.fr
Deux morts, quatre blessés par balle. Pour la quatrième fois en quinze jours, les armes ont parlé, lundi 24 août 2020, quartier des Izards, à Toulouse. Tentatives d’explications.
Le feu n’a pas pris. Dans la voiture imprégnée d’essence que les malfrats ont tenté d’incendier, lundi 24 août 2020, à La Cépière, au terme d’une course-poursuite, les forces de l’ordre ont trouvé des armes. De nombreuses armes. Et de tout calibre.
Mortellement touché dans le dos
Pistolet-mitrailleur(s), fusil(s), arme(s) de poing. Des armes qui ont une nouvelle fois parlé à Toulouse, dans la soirée du lundi 24 août, et une fois encore aux Izards, laissant sur la carreau un jeune homme de 19 ans, mortellement blessé au dos par un projectile.
Depuis quelques semaines, les fusillades s’enchaînent dans ce quartier populaire du nord de Toulouse. Et ce n’est pas sans doute pas un hasard. En point de mire, le contrôle du trafic de stupéfiants. Un bon connaisseur du dossier indique à Actu Toulouse :
Le point de deal situé autour de la station de métro 3 Cocus est très convoité. Celui qui le gérait n’est plus là. Et d’autres veulent prendre la relève. Ça ressemble à une guerre de territoires, sans doute entre le Mirail et les Izards…
La courte accalmie du confinement
C’est en effet du côté de la Cépière que le véhicule utilisé par les tueurs de lundi soir, a été retrouvé, tout comme ces deux individus, âgés de 20 et 28 ans. Est-ce un hasard ?
Au mois d’avril 2020, en plein confinement, la (nouvelle) directrice de la PJ de Toulouse, la commissaire divisionnaire Nathalie Tallevast, constatait « une accalmie des règlements de comptes depuis quelques mois, [malgré] une tentative en janvier ». Cette trêve n’a pas duré.
Les difficultés d’approvisionnement pendant le confinement ont-elles exacerbé les tensions entre les divers acteurs de ce marché (illégal) ? La pénurie en cannabis ou cocaïne constatée chez certains dealers a-t-elle poussé les clients à changer de crèmerie ? Difficile à affirmer à ce jour.
Gros réseau démantelé en juin
Aux Izards, un événement post-confinement a sans doute davantage bouleversé l’équilibre du marché. Au mois de juin, les policiers de la Sûreté Départementale y ont démantelé un gros réseau de trafiquants de drogue. Un policier confie :
Il existe deux gros quartiers à Toulouse pour le trafic de stups : le Mirail, que se disputent plusieurs groupes, et les Izards
Un point de deal à 20 000 € par jour
Le point de deal des Izards rapportait de l’ordre de 20 000 euros… par jour. Près de 50 kilos de drogue saisis, des armes, 45 000 € en cash, 16 interpellations à l’échelle du territoire nationale. « C’étaient, pour la grande majorité, des habitants du quartier. Trois autres hommes avaient été arrêtés dans une villa de Saint-Tropez », indique notre source.
Un rude coup porté aux trafiquants. Dont la juteuse carotte serait désormais convoitée par d’autres groupes criminels ? « On ne connaît pas encore vraiment le dessous de ces affaires », élude un membre des forces de l’ordre.
Toutes les victimes ont la vingtaine
En l’espace de quinze jours, les règlements de compte aux Izards se succèdent à un rythme effréné. Pour s’approprier le gâteau ? Depuis le 10 août 2020, les policiers ont relevé deux morts et trois blessés par balle dans le quartier. Toutes les victimes sont âgées de la vingtaine.
A en croire la police, c’est une conséquence directe du dernier coup de pied asséné dans la fourmilière :
Les différents services de la direction départementale de la sécurité publique mettent la pression au quotidien pour déstabiliser tous ces trafics. Il y a une grosse synergie entre les services. Les agents de terrain travaillent en flagrant-délit et font remonter des informations. Les enquêteurs de la Sûreté départementale creusent en profondeur et au final, cela aboutit aux coups de filet du mois de juin…
Place des Faons, rue des Chamois, chelmin des Izards, métro 3 Cocus… Autant de patronymes qui reviennent en boucle dans les compte-rendus policiers lorsqu’il s’agit d’évoquer l’interpellation de petits dealers ou de leur clientèle dans le quartier. Le procureur de la République de Toulouse, Dominique Alzeari, a d’ailleurs toujours revendiqué faire de ce dossier de lutte contre le trafic de drogue, « la priorité numéro un » de son action.
Deux tueurs présumés en garde à vue
Le Service régional de police judiciaire (SRPJ) de Toulouse supervise l’ensemble des dossiers de fusillades aux Izards. Celui de cette nuit s’ajoute à l’affaire du pilote de scooter blessé par balle à la jambe du week-end. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la pile prend de l’épaisseur.
Mais le règlement de comptes mortel de ce lundi présente une différence majeure avec les autres affaires : deux tueurs présumés ont été interpellés et placés en garde à vue. Et cela pourrait bien changer la donne…
Alliance « s’inquiète de la prolifération des armes »
Dans un communiqué envoyé à la mi-journée, le syndicat Alliance Police Nationale » déplore des « crimes d’habitude » qui ont ponctué l’été de la capitale Occitane ». « Toulouse n’ayant hélas plus rien à envier en terme de banditisme à d’autres mégapoles », le syndicat, qui « s’inquiète de la prolifération des armes », demande « que la zone difficile soit reconnue à tous les policiers toulousains ». Alliance PN tient également « à souligner le sang-froid et le professionnalisme des policiers toulousains qui ont permis l’interpellation des deux tueurs ».