Plusieurs critères sont établis afin de déterminer si «forfaitisation» il y aura.
JUSTICE « LE FIGARO » a décortiqué le mode d’emploi de la « forfaitisation » pour usage de drogue produit par la Chancellerie à la veille du lancement du dispositif. Cette « dépêche » de 12 pages, datée du 31 août et adressée aux procureurs généraux, procureurs et présidents des tribunaux judiciaires, est signée par Catherine Pignon, alors directrice des affaires criminelles et des grâces.
D’emblée, elle précise que cette procédure n’est pas applicable « lorsque le délit a été commis par un mineur » , ou « lorsque plusieurs infractions, dont l’une au moins ne peut donner lieu à une amende forfaitaire, ont été constatées simultanément » . Une « fumette » et un vol de sac à main, par exemple.
Échappe également à cette procédure simplifiée l’usage de stupéfiant « aggravé par la qualité de son auteur » . Un policier ou un gendarme fumeurs de joints, par exemple, ou un commandant de navire, un chauffeur routier, un pilote d’avion ou encore un conducteur de bus ou de car.
« En opportunité » , l’agent est invité à ne pas verbaliser s’il y a « pluralité de délits forfaitisables constatés » . L’informatique mise à sa disposition ne sait pas « lier des infractions distinctes » relevées par les terminaux mobiles que détiennent actuellement les policiers. Raison technique donc.
Autre exclusion : « Les conducteurs de véhicule terrestre à moteur » , puisque la situation relève en principe d’un délit plus sévèrement réprimé de conduite après usage de stupéfiant ; ou encore « la découverte de plusieurs types de produits stupéfiants différents » . Là, c’est le signe qu’il y a « polytoxicomanie » nécessitant traitement sanitaire et social. De toute façon, « le procès-verbal électronique ne prévoit la possibilité de saisir qu’un seul type de stupéfiant » .
Fromage ou dessert ?
Il faudra également renoncer à l’amende si « le mis en cause ne peut justifier de son identité ou ne déclare aucune adresse postale » . Il s’agit d’éviter notamment les usurpations d’identité. Il convient aussi d’abandonner en cas de « contestation des faits par le mis en cause » ou de « refus de renoncer aux droits attachés à la confiscation et à la destruction des stupéfiants et accessoires saisis » . Car cette procédure n’a « pas vocation à générer un contentieux important » .
Autre cas où la police renoncera au nouvel outil : quand le contrevenant est « shooté » ou ivre, ou bien s’il s’agit d’un étranger ne maîtrisant pas la langue de Molière. « La procédure d’amende forfaitaire ne devra pas être mise en oeuvre lorsque la personne présente des difficultés de compréhension du fait de son absence de maîtrise de la langue française » , enjoint la Chancellerie.
Pas d’amende non plus s’il faut « procéder à des investigations complémentaires » . Raison invoquée : la forfaitisation « ne permet pas, techniquement, d’adjoindre d’autres procès-verbaux à la procédure générée électroniquement. » Un policier ironise : « Mais qui a conçu ce logiciel ? »
En tout état de cause, renoncer à forfaitiser ne signifie pas renoncer à punir. Le mode d’emploi de la Chancellerie insiste sur ce point : « Il conviendra de veiller à ce que les suites judiciaires réservées aux usagers mettant en échec la procédure d’amende forfaitaire délictuelle ou ayant, sans motif valable, contesté celle-ci, soient empreintes de fermeté » . La Chancellerie a fixé une autre règle : « Il convient d’exclure le recours à la procédure d’amende forfaitaire pour d’autres stupéfiants que le cannabis, la cocaïne et l’ecstasy. »
Le crack ou le LSD, par exemple. En outre, « les quantités maximales susceptibles de donner lieu à une telle procédure sont les suivantes : jusqu’à 50 grammes pour le cannabis, jusqu’à 5 grammes pour la cocaïne et jusqu’à 5 cachets ou 5 grammes de poudre pour l’ecstasy. »
Dernière innovation : à l’issue du contrôle, le contrevenant se voit remettre en principe un « coupon addiction » rappelant les adresses des structures d’aide aux toxicomanes. L’avis d’amende qu’il recevra comporte aussi une « infographie pédagogique » relative aux dangers de la drogue. « On verra à l’usage, mais quelle usine à gaz » , ne peut s’empêcher de commenter un capitaine de police parisien.
J.- M. L.
Source : Lefigaro.fr