Le Progrès (Lyon)
Rhône, vendredi 5 mars 2021
A.D.
Yanis garde les pieds sur terre et ne rêve pas de grimper dans les échelons du trafic. Il se confie sur son « business » aux risques très calculés.
Nous l’appellerons Yanis et le rencontrons à Lyon. Âgé de 20 ans, c’est un petit dealer qui a déjà effectué un an de prison pour trafic de stupéfiants. L’école ? Il y est allé et a même passé son Bac avant d’obtenir un DUT Gestion des entreprises et des administrations. Il a décroché un CDD… dans un organisme public.
Yanis garde les pieds sur terre et ne rêve pas de grimper dans les échelons du trafic : « Il ne faut pas être trop gourmand, c’est trop de stress. Quand tu te différencies, tu fais de l’ombre à des gens et c’est risqué. Il faut se faire de l’argent quand tu es jeune, mettre de côté et arrêter avant 30 ans. L’idée c’est de stopper quand j’aurai une situation financière légale et stable ».
« Le gérant vérifie tout »
Comme il n’en est pas là, il continue de dealer un peu de tout dont de la cocaïne mais incognito. « Je ne me salis pas les mains, je fais travailler des charbonneurs [des vendeurs]. Je sous-traite pour n’avoir aucun lien avec le réseau. Je ne communique pas par téléphone. C’est simple : on ne me voit pas, mais je suis là.. »
La crise sanitaire a dopé la livraison, nous confie-t-il. Mais les clients continuent de se déplacer : « Ça fonctionne beaucoup par les réseaux sociaux. On dit : « Venez à telle ou telle heure »».
Il nous raconte une organisation identique d’un quartier à l’autre avec ces « gérants » à l’oeil aiguisé : « C’est lui qui donne la marche à suivre pour la journée. Toutes les quatre heures, il récupère l’argent et ravitaille si besoin. Il sait exactement ce qu’il donne à ses charbonneurs. Il peut dire : « Dans la sacoche, tu as 6 000 € ». Dedans, il y a des poches avec des morceaux à 20 €, 30 €… Le gérant vérifie tout, note tout. À leur retour, il fait les comptes. »
« Si tu es nul, tu sautes »
Il arrive que certains charbonneurs se trompent en fourguant leur marchandise : « Si tu es nul, tu sautes et tu n’es pas payé ». Yanis explique qu’il faut savoir aussi avoir la bonne attitude quand les flics se pointent dans le quartier : « Il faut anticiper. Si tu vois la police, tu te sauves et tu jettes tes affaires. Il faut être organisé et vif. Il y en a qui apprennent vite, qui sont malins et ont le sens des affaires. »
Yanis reconnaît que les trafiquants craignent davantage la concurrence que les forces de l’ordre. « On les repère. Les plaques banalisées sont notées sur les murs. »
« Ça fonctionne beaucoup par les réseaux sociaux », confie Yanis. Ici, de la « promo » pour un point de deal de Vénissieux sur Snapchat. Photo Progrès /DR
Source : Leprogrès.fr